La cryothérapie : qu'est-ce que c'est exactement ?
La cryothérapie est un acte de physiothérapie qui consiste à délivrer dans une cabine un froid intense, produit par injection d’azote sous forme de gaz, pendant une courte période, soit sur le corps entier, soit sur le corps à l’exception de la tête.
L’acte peut avoir deux finalités.
Cryothérapie thérapeutique (ou médicale)
On parle de cryothérapie médicale ou thérapeutique lorsque la cabine est utilisée dans des indications qui revendiquent un traitement de certaines pathologies :
- diminution et soulagement des douleurs, notamment liées aux maladies rhumatismales ;
- traitement des symptômes de la sclérose en plaque ;
- traitement de pathologies comme l’eczéma ou le psoriasis ;
- amélioration des troubles asthmatiques ;
- atténuation de la dépression, etc.
Cryothérapie non-médicale (ou "bien-être")
On parle de cryothérapie non médicale (ou "bien-être") quand l’effet recherché relève par exemple de :
- la récupération après un effort physique intense ;
- l'entraînement du sportif ;
- l'esthétique (raffermissement de la peau, réduction de la cellulite, régénération cellulaire).
Cryothérapie : quelle compétence pour les médecins ?
L’arrêté du 6 janvier 1962 fixant la liste des actes médicaux ne pouvant être pratiqués que par des médecins réserve à ces derniers "tout acte de physiothérapie aboutissant à la destruction si limitée, soit-elle des téguments, et notamment la cryothérapie, l'électrolyse, l'électrocoagulation et la diathermo-coagulation".
Quelle que soit la finalité recherchée, le médecin peut donc pratiquer la cryothérapie, et ce même si elle aboutit à la destruction des téguments.
Qu’entend-on par "téguments" ?
Ce sont les tissus ou l’ensemble de tissus recouvrant et enveloppant un organisme vivant : chez l'homme, le tégument est formé par la peau et ses annexes, les phanères (poils, cheveux, ongles) et les glandes (glandes sébacées, glandes sudoripares).
Cryothérapie : quelle compétence pour les masseurs kinésithérapeutes ?
Selon l’article R4321-7 du code de la santé publique, le masseur-kinésithérapeute est habilité, sur prescription médicale, à réaliser la "thermothérapie et cryothérapie, à l'exclusion de tout procédé pouvant aboutir à une lésion des téguments".
Le champ d’action du kinésithérapeute est donc beaucoup plus étroit que celui du médecin : sa compétence en matière de cryothérapie ne porte que sur les actions qui n’aboutissent pas à une lésion des téguments, et il ne peut agir que sur prescription médicale.
Cryothérapie : quelle compétence pour les non-professionnels de santé ?
La question est importante car la cryothérapie est un secteur en pleine croissance. Aujourd’hui, de très nombreux centres sportifs, d’esthétique ou de bien-être proposent ce type de prestation.
Les non-professionnels de santé qui pratiquent la cryothérapie peuvent-ils se voir reprocher un exercice illégal de la profession de médecin ou de kinésithérapeute, puisque ces techniques semblent leur être réservées ? Ce n’est pas si simple.
Aucun texte ne leur interdit expressément de pratiquer la cryothérapie, dès lors que l’on se situe hors du champ des soins.
Pour trancher (souvent au cas par cas), les juges vont prendre en compte plusieurs éléments.
Distinction cryothérapie médicale (ou thérapeutique) et cryothérapie sans finalité curative
C’est ce qu’a fait la Cour de cassation dans un arrêt du 10 mai 2022. Elle a retenu l’exercice illégal dans une affaire dans laquelle des séances de cryothérapie "corps entiers" avaient été pratiquées par des non-médecins, sans surveillance médicale, au sein d’un institut de beauté.
La finalité thérapeutique de ces actes a été un critère essentiel pour les juges :
- Le contrat de prestation de service comportait un article dédié aux contre-indications médicales.
- Les actions promotionnelles pour l’institut insistaient particulièrement sur le soulagement des douleurs induites par les maladies et promettaient même une "guérison" de certains troubles douloureux.
Il a donc été considéré que les prévenus s’étaient livrés, de manière habituelle et par l'intermédiaire de la société dont ils étaient les gérants, au traitement de maladies congénitales ou acquises, réelles ou supposées. D’où leur condamnation pour exercice illégal.
Existence d’une destruction, même limitée, des téguments
Dans l’arrêt du 10 mai 2022 déjà cité, le critère de la destruction des téguments a été essentiel.
En effet, la victime a présenté des engelures profondes aux 2e et 3e degrés. Les juges en ont déduit que l’acte a abouti à la destruction, si limitée soit-elle, des téguments, telle que visée à l’arrêté de 1962 : le gérant du centre s’est rendu coupable d’exercice illégal de la médecine.
Une évolution législative est sans doute nécessaire
La distinction entre cryothérapie thérapeutique et de bien-être peut être bien difficile à faire. En effet, dans la décision précitée de la Cour de cassation du 10 mai 2022, qu’en aurait-il été si :
- Les pratiques promotionnelles du centre n’avaient pas été aussi maladroites, mettant en avant une volonté de remédier à des troubles ou à des maladies ?
- Aucune destruction des téguments n’avait été constatée ?
La solution réside certainement dans une réglementation plus précise des compétences requises pour les non-professionnels de santé pour pratiquer la cryothérapie. Même si aucune des tentatives initiées dans ce sens n’a pu aboutir à ce jour, sans doute le très grave accident survenu en 2025 dans une salle de sport changera-t-il la donne.