L’interdiction de discrimination fondée sur l’apparence physique a été intégrée dans le code du travail (article L1132-1 du code du travail). En pratique la jurisprudence associe le motif discriminant à un autre critère permettant de caractériser la discrimination fondée "sur l’apparence physique du salarié rapportée à son sexe".
Rappel de la jurisprudence antérieure
La décision de la Cour de Cassation présentée ici se situe dans le prolongement de la décision de la chambre sociale de la cour de cassation rendue 2012 dans le cadre de l’arrêt dit "des boucles d’oreilles" (Cass soc 11 Janvier 2012, n° 10-28.213).
A l’époque, la décision concernait un chef de rang d’un restaurant étoilé qui avait été licencié en raison de son refus de retirer sa boucle d’oreille pendant le service.
La lettre de licenciement avait mentionné spécifiquement l’apparence physique du salarié lié à son sexe, de plus l’employeur n’avait pas justifié sa décision par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination.
La cour de cassation avait conclu à une discrimination injustifiée fondée sur l’apparence physique du salarié rapportée à son sexe.
Une nouvelle illustration jurisprudentielle de la combinaison des critères discriminants
En date du 23 novembre dernier la Cour de Cassation va préciser cette jurisprudence en indiquant que "le fait d’interdire une coiffure à un homme alors que celle-ci est tolérée pour une femme est considéré comme une discrimination fondée sur l’apparence physique en l’absence d’exigence professionnelle véritable et déterminante".
En l’espèce, il s’agissait d’un personnel naviguant masculin qui s’était vu interdire le port de tresses nouées en chignon alors que cette coiffure était autorisée pour les femmes.
Le salarié licencié avait saisi la juridiction prud’homale pour discrimination liée au sexe débouté par les juges du fond, une action est engagée devant la Cour de Cassation qui s’est prononcée en faveur du salarié.
Dans cette décision, la haute juridiction se fonde sur le principe de l’égalité des chances et de l’égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d’emploi et de travail pour justifier sa décision et préciser la jurisprudence en cours. (Directive 2006/54/CE du parlement européen et du conseil du 5 juillet 2006 retranscrit dans le code du travail).
La chambre sociale appui son argumentation sur le fait que les différences de traitement en raison du sexe doivent être "justifiées par la nature de la tâche à accomplir, répondre à une exigence professionnelle véritable et déterminante et être proportionnée au but recherché".
Dans cette décision, la Cour motive sa décision sur le fait que les différences doivent renvoyer à "une exigence objective dicée par la nature ou les conditions d’exercice de l’activité professionnelle en cours".
En toute logique et au seul vu de cet argumentaire la discrimination directement fondée sur l’apparence en lien avec le sexe est constituée pour la cour de cassation.
La décision cadre du Défenseur des droits en matière de discrimination
Rappelons que dès 2019 le Défenseur des droits s’était saisi de la question de la discrimination fondée sur l’apparence physique et a adopté une décision cadre regroupant ses recommandations.
L’apparence physique est définie comme "l’ensemble des caractéristiques physiques et des attributs visibles propres à une personne qui relèvent tant de son intégrité physique et corporelle que d’éléments liés à l’expression de sa personnalité (tenues et accessoires vestimentaires, coiffure, barbe, piercings, tatouage et maquillage…)". |
A ce titre, les recommandations du Défenseur des droits à l’attention des employeurs consistent à recommander de consigner dans un document écrit les exigences liées à l’apparence physique des lors qu’elles sont identifiées comme justifiées par la nature de l’emploi occupé et de la tâche à accomplir, légitimes et proportionnées au but à atteindre. (Défenseur des droits, décision cadre n 2019 205 du 2 octobre 2019).
A retenir
Il convient au vu de cette jurisprudence réaffirmée de la Cour de Cassation et des positions du défenseur des droits d’inciter les employeurs, y compris des professionnels de santé, à une grande vigilance quant à leurs exigences liées à l’apparence physique de leurs salariés.