L'infirmière doit avoir la maîtrise de son geste
Un arrêt de la Cour de cassation du 6 juin 2000 a retenu l’entière responsabilité d’une infirmière libérale qui lors de l’exécution d’une injection sur une fillette de 7 ans a provoqué une atteinte dommageable du nerf sciatique.
Pour condamner la soignante, la Cour a affirmé que l’infirmière avait commis une imprudence en effectuant son geste sur cette fillette hors la présence de sa mère. Si dans ces conditions, il était, en effet, prévisible que l’enfant angoissée bouge, la Cour ne s’est pas contentée de relever cette faute pour rendre sa décision mais est allée plus loin en affirmant que l’infirmière "doit avoir la maîtrise de son geste".
Comme "un conducteur doit avoir la maîtrise de son véhicule", une infirmière doit normalement "avoir la maîtrise de son aiguille". De la survenance d’un dommage directement lié au trajet de l’aiguille lors de l’injection (compression d’un nerf, hématome, infection..), le juge va généralement présumer l’existence d’une faute de l’infirmière.
Il ne s’agit toutefois pas d’une obligation de résultat mais en réalité d’une obligation de moyens renforcée : l’infirmière peut se dégager de sa responsabilité, à charge pour elle de rapporter des éléments permettant d’établir que le dommage était imprévisible et irrésistible (caractéristiques morphologiques, réactions anormales, négligences septiques du patient…).
L'infirmière est responsable de la surveillance immédiate des effets des produits administrés
Il s’agit d’une obligation de moyens simple qui relève d’un point de vue général du rôle propre de l’infirmière et qui correspond de manière plus particulière à une obligation accessoire de l’exécution de l’injection : une infirmière ne peut pas quitter un patient sans s’être assurée que celui-ci n’encoure pas un risque connu eu égard à son état ou à la nature du produit injecté (allergène, produit de contraste iodé…).
Enfin, lorsqu’une infirmière est amenée à exécuter une prescription nécessitant plusieurs injections échelonnées sur plusieurs jours, celle-ci doit surveiller la tolérance du patient au produit et ne pas persévérer à exécuter la prescription si l’état du patient venait à se détériorer sans que le médecin soit dûment averti.
Ainsi, par exemple, une infirmière libérale a-t-elle pu être reconnue partiellement responsable du décès d’un patient pour avoir déraisonnablement persisté à exécuter une prescription excessive de corticoïdes alors que le patient présentait des signes évidents de faiblesse.
Seuls le médecin prescripteur et/ou le fabricant sont susceptibles d'être tenus responsables des effets des produits administrés
Si l’infirmière est responsable de l’exécution de l’injection et de la surveillance des effets des produits injectés, elle ne peut-être tenue responsable des effets de ceux-ci sauf bien entendu si l’infirmière a mal lu la prescription (a fortiori agi sans prescription) ou mal vérifié la date de péremption, le mode d'administration des produits qu'elle utilise (cutané, intraveineux, artériel...).
Il pourrait alors s’agir d’une erreur du médecin dans sa prescription (interaction médicamenteuse, effets indésirables), d’une défectuosité ou d’une dangerosité intrinsèque au produit dont le fabricant doit répondre, ou tout simplement d’un aléa thérapeutique lié à une réaction imprévisible du patient sans que personne ne puisse être reconnu fautif.