La substitution d’un générique est le principe, le refus est l’exception
Depuis 1999, le pharmacien a la possibilité de substituer au médicament prescrit par le médecin en dénomination commune une spécialité figurant dans un groupe générique permettant de respecter la prescription.
Pendant longtemps, la substitution d’une spécialité figurant dans un groupe générique ou hybride n’a été possible qu’à la condition d’obtenir l'accord exprès et préalable du prescripteur, sauf situation d’urgence.
Toute substitution était impossible quand le prescripteur avait "exclu cette possibilité, pour des raisons particulières tenant au patient, par une mention expresse portée sur la prescription, sous forme exclusivement manuscrite".
Ainsi, aucune justification n’était demandée au prescripteur, qui pouvait exclure la substitution par la simple mention manuscrite "non substituable" sur l’ordonnance.
La Cour de cassation, par un arrêt du 31 mai 2018 (n° 17-17749) a jugé que le recours à une prescription assortie de la mention "non substituable" devait être justifié par le praticien prescripteur.
La loi n° 2018-1203 du 22 décembre 2018 de financement de la Sécurité sociale pour 2019 et la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 relative à l’organisation et à la transformation du système de santé ont entériné ce raisonnement :
La substitution à la spécialité prescrite d'une spécialité du même groupe générique est possible, à la condition que le prescripteur n'ait pas exclu cette possibilité par une mention expresse et justifiée portée sur l'ordonnance.
Cette nouvelle règle s’applique pour toutes les prescriptions médicamenteuses à partir du 1er janvier 2020.
L’arrêté du 12 novembre 2019 modifié par un arrêté du 30 janvier 2020 définit quelles sont les justifications possibles.
Quelles justifications possibles à un refus de substitution ?
Il existe trois justifications possibles pour le prescripteur :
Marge thérapeutique étroite
En cas de prescription de médicaments à marge thérapeutique étroite, afin d'assurer la stabilité de la dispensation, lorsque les patients sont effectivement stabilisés avec un médicament. La liste des principes actifs entrant dans la composition de ces médicaments à marge thérapeutique étroite figure dans les annexes de l’arrêté de 2019, complété par un arrêté du 20 juillet 2022.
Dans ce 1er cas, le pharmacien peut exclure de lui-même la substitution, même quand le prescripteur ne l'a pas exclue sur l'ordonnance. Dans ce cas, il le mentionne sur l'ordonnance, sous forme manuscrite, le cas échéant pour chaque médicament prescrit et informe le prescripteur de cette absence de substitution.
Patient de moins de 6 ans
En cas de prescription réalisée chez les enfants de moins de 6 ans, lorsqu'il n'existe aucune forme galénique adaptée parmi les médicaments génériques et que le médicament de référence disponible permet cette administration.
Patient présentant une contre-indication
En cas de prescription pour les patients qui présentent une contre-indication formelle et démontrée à un excipient à effet notoire présent dans tous les médicaments génériques disponibles, à la condition évidemment que le médicament de référence ne comporte pas lui-même cet excipient notoire.
Refus de substitution : sous quelle forme ?
Lorsque l'une des trois conditions précitées est satisfaite, le prescripteur doit le mentionner sur l'ordonnance, soit de manière manuscrite, soit sous forme informatisée, et ce pour chaque médicament concerné et chaque situation médicale.
- Pour les médicaments à marge thérapeutique : mention "non substituable MTE" en toutes lettres.
- Pour les prescriptions concernant les enfants de moins de 6 ans : mention "non substituable EFG" en toutes lettres.
- Pour les situations concernant les contre-indications à un excipient à effet notoire : mention "non substituable CIF" en toutes lettres.
Que deviennent les "raisons particulières tenant au patient" ?
Avant 2018, le médecin prescripteur pouvait s’opposer à la substitution d’un générique au médicament prescrit pour des raisons particulières tenant au patient.
Par exemple, il pouvait craindre qu’un patient, habitué de longue date à l’aspect de son traitement (forme et couleur des pilules), soit perturbé par un changement, avec à la clé un risque de mauvaise observance ou d’erreur dans les prises.
Ce motif n’entre pas dans les trois hypothèses évoquées dans l’arrêté.
Le prescripteur ne peut donc l'avancer pour s’opposer à une substitution.
Cependant, il peut toujours inscrire sur la prescription une information complémentaire, destinée au pharmacien, afin que celui-ci en tienne compte en cas de substitution. Il peut par exemple attirer l’attention sur l’importance de la couleur des pilules ou de leur taille en fonction des besoins propres au patient.
Il est à noter que les pharmaciens se sont engagés dans leur convention nationale avec l’assurance maladie à assurer la stabilité de la dispensation auprès des patients de plus de 75 ans souffrant de pathologies chroniques.
En d’autres termes, la substitution doit toujours porter sur le même générique, sans changements intempestifs qui pourraient déstabiliser le patient.