Aménagements d’examens : que dit la loi ?
Le code de l’éducation rappelle, tant à l’article L.112-4 que D.112-1, l’exigence d’égalité réelle entre les candidats. Cette exigence suppose la mise en place d’aménagements aux conditions de passation des épreuves orales, écrites, pratiques ou de contrôle continu des examens ou concours, au bénéfice des étudiants en situation de handicap ou présentant un trouble de la santé invalidant.
Ces aménagements portent sur tous les examens ou concours de l’enseignement scolaire et de l’enseignement supérieur organisés par :
- le ministre chargé de l’Éducation nationale,
- le ministre chargé de l’Enseignement supérieur,
- des établissements sous tutelle ou services dépendant de ces ministres.
Les différents types d’aménagements possibles sont énumérés à l’article D.613-26 du même code.
Qui peut demander des aménagements d’examens ?
Le critère pour demander des aménagements d’examens est la reconnaissance d’une situation de handicap ou d’un trouble de santé invalidant chez le candidat.
Le handicap est défini par plusieurs textes :
- L’article L.114 du code de l'action sociale et des familles : "Constitue un handicap toute limitation d'activité ou restriction de participation à la vie en société subie dans son environnement par une personne en raison d'une altération substantielle, durable ou définitive d'une ou plusieurs fonctions physiques, sensorielles, mentales, cognitives ou psychiques, d'un polyhandicap ou d'un trouble de la santé invalidant."
- La Convention internationale des droits des personnes handicapées, entendues comme "des personnes qui présentent des incapacités physiques, mentales, intellectuelles ou sensorielles durables dont l'interaction avec diverses barrières peut faire obstacle à leur pleine et effective participation à la société sur la base de l'égalité avec les autres."
Bon à savoir
- Les limitations temporaires d’activité, liées par exemple aux suites d’un accident, entrent dans la catégorie du handicap ou du trouble de santé invalidant pouvant ouvrir droit à des aménagements.
- La demande d’aménagements n’est pas conditionnée par la reconnaissance d’une situation de handicap par la MDPH (maison départementale des personnes handicapées). L’étudiant n’est donc pas obligé d’entreprendre des démarches auprès de la MDPH pour prétendre à des aménagements.
Sur quoi peuvent porter les aménagements d’examens ?
Les aménagements possibles sont nombreux et très variés, en fonction du type de handicap présenté par le candidat. Ils sont énumérés à l’article D.613-26 du code de l’éducation. Ils peuvent porter sur différents aspects des examens.
Pour plus d’information, consultez cet article "Quels sont les aménagements possibles pour les concours et examens ?" sur mon Parcours Handicap.gouv.fr
Les lieux de l’examen
L’accessibilité des locaux dans lesquels l’examen a lieu est évidemment indispensable. Il appartient à l’établissement organisateur d’y veiller.
Il peut par exemple être prévu :
- un plan incliné pour faciliter le passage d’un fauteuil roulant,
- un espace suffisant autour de la place où le candidat compose afin de lui permettre de se déplacer ou d’installer un éventuel matériel spécifique à son handicap.
Parfois, une salle à effectifs réduits ou dédiée à un candidat peut être mise à disposition, par exemple pour un étudiant autiste qui peut être gêné par le bruit.
Enfin, dans l’hypothèse d’un lieu d’examen éloigné géographiquement du domicile de l’étudiant handicapé, il peut être décidé de faire passer l’épreuve à distance ou dans un établissement de proximité. Cette dernière hypothèse est relativement rare car elle suppose la rédaction préalable d’une convention entre l’organisateur et l’établissement d’accueil.
Les sujets d’examen
Pour des raisons d’équité, le candidat en situation de handicap doit en principe composer sur les mêmes sujets que les candidats qui suivent le même cursus.
Mais ces sujets peuvent être adaptés, de différentes manières selon la nature du handicap :
- Adaptation des caractères (agrandis ou en braille par exemple en cas de déficience visuelle).
- Neutralisation de certaines questions ou dispense partielle d’épreuve.
- Remplacement de certaines épreuves par d’autres, par exemple l’expression orale par une forme d’expression écrite.
La durée et l’organisation horaire de l’examen
- La durée de l’examen peut être allongée via le système dit du "tiers-temps" : la durée des épreuves est majorée jusqu’à un tiers du temps total de l’examen, au maximum.
- Des pauses supplémentaires peuvent être accordées.
- Les épreuves peuvent être organisées sur plusieurs jours au lieu d’un seul ou étalées sur plusieurs sessions.
Bon à savoir
En cas de tiers-temps, un temps de pause suffisant entre deux épreuves doit être prévu pour permettre au candidat de ne pas enchaîner les examens sans période de repos.
Les notes de l’examen
Les étudiants en situation de handicap ont la possibilité de conserver les notes obtenues à certaines épreuves durant 5 ans.
Focus sur les ECOS
Les examens cliniques objectifs structurés (ECOS) qui conditionnent l’entrée en 3e cycle des études de médecine ont des modalités particulières : ils consistent en deux jours d’examens pratiques, comportant des "stations" qui mettent à l’épreuve les connaissances et compétences du candidat à partir de mises en situation. Le candidat passe d’une station à une autre par un système complexe de rotations.
Pour les étudiants en situation de handicap, les aménagements sont possibles : il est alors prévu un circuit supplémentaire ou un circuit incomplet dédié à leurs rotations.
Aides humaines, aides techniques, ou les deux ?
Selon le handicap dont il est atteint, l’étudiant peut avoir besoin d’une aide humaine ou technique, voire des deux combinées.
Les aides humaines
Il peut s’agir d’un assistant ou d’un aide :
- pour l’installation du candidat,
- pour écrire sous sa dictée,
- pour relire, reformuler ou expliquer les consignes,
- pour décrire les images,
- pour interpréter en langue des signes, etc.
Les aides techniques
Le candidat peut être autorisé à utiliser un matériel spécifique (y compris personnel, sous certaines conditions) pour écrire, lire ou composer. Par exemple : un logiciel, une machine à écrire en braille, un ordinateur ou une tablette, un convertisseur, etc.
Comment demander un aménagement d’examens ?
Les modalités pour formuler une demande varient en fonction du type d’études, du cursus et des universités ou établissements.
Il est important de se renseigner très précisément sur les conditions et les échéances au sein-même de son établissement pour ne pas risquer de laisser passer une date butoir. Ces renseignements peuvent être obtenus auprès des référents handicap et du service de santé universitaire.
Voici cependant les grandes étapes qui sont généralement communes à tous les cursus, avec quelques variantes.
Étape 1 : Mise en relation avec la structure handicap
C’est la toute première démarche à envisager. Un entretien avec la cellule handicap (cette appellation peut changer selon les universités) permet de faire le point sur les besoins de l’étudiant dans leur ensemble (pédagogiques, matériels, pour le contrôle des connaissances, etc.).
Il est établi un PAEH (plan d’accompagnement de l’étudiant handicapé) qui répond au mieux aux besoins et sert de base à la demande d’aménagements.
Étape 2 : Formulation de la demande
Le candidat peut y adjoindre tous les éléments, notamment médicaux (sous pli confidentiel) mais également pédagogiques, qui permettent l'évaluation la plus complète possible de sa situation. Certains établissements demandent au candidat de fournir une fiche médicale, complétée par le médecin traitant ou le médecin assurant le suivi en fonction du handicap.
La demande est adressée au médecin désigné par la CDAPH (Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées) par l'intermédiaire du médecin du service de santé universitaire (SSU).
Pour les épreuves dématérialisées nationales (EDN), le destinataire est le Centre national de gestion, département autorisations d'exercice-concours-coaching, bureau des concours nationaux (EN), immeuble Le Ponant B, 21, rue Leblanc, 75737 Paris Cedex 15.
Une date butoir, propre à chaque type d’examen, doit être respectée. À titre d’exemples :
- Pour les épreuves dématérialisées nationales (EDN) en 2024, la demande devait être adressée avant le 5 août au titre de l’année universitaire 2025-2026.
- Pour les ECOS (examen clinique objectif et structuré), le dossier devait avoir été adressé avant le 11 mars 2024 pour l’année universitaire 2024-2025.
Bon à savoir
Ces dates butoir ne sont pas impératives quand la situation de handicap s’est révélée ou s’est modifiée après l’échéance.
Étape 3 : L’avis du médecin
Conformément à l'article D.613-27 du code de l'éducation, le médecin de la CDAPH rend un avis sur les aménagements demandés.
Pour ce faire, il tient compte :
- des besoins du candidat,
- des informations transmises,
- des aménagements dont le candidat a pu antérieurement bénéficier au cours de sa scolarité.
Cet avis comporte les conditions particulières proposées au candidat (aides matérielles et/ou humaines, adaptation des sujets, majoration du temps de composition, etc.) et le type d’épreuves concerné (car les aménagements peuvent ne porter que sur certaines épreuves seulement).
Il est adressé au candidat et à l'autorité administrative compétente pour organiser l'examen ou le concours.
Étape 4 : La décision de l’autorité administrative compétente
L'autorité administrative compétente pour ouvrir et organiser l'examen ou le concours décide des aménagements accordés en s’appuyant sur l'avis rendu par le médecin désigné par la CDAPH (qui ne constitue pas une décision administrative et ne s’impose pas à elle).
Cette décision est notifiée au candidat dans les deux mois à compter de la réception de la demande et/ou de l'avis du médecin, avec indication des délais et voies de recours.
Bon à savoir
Pour les EDN et les ECOS, cette notification se fait sur le compte « Even » du candidat, dont le lien est disponible sur le site internet : www.cng.sante.fr.
Que faire en cas de refus d’aménagements ?
L’article 2 de la Convention relative aux droits des personnes handicapées (CIDPH) énonce que "la discrimination fondée sur le handicap comprend toutes les formes de discrimination, y compris le refus d’aménagement raisonnable".
Cette notion d’aménagement raisonnable recouvre "les modifications et ajustements nécessaires et appropriés n’imposant pas de charge disproportionnée ou indue apportés, en fonction des besoins dans une situation donnée, pour assurer aux personnes handicapées la jouissance ou l’exercice, sur la base de l’égalité avec les autres, de tous les droits de l’homme et de toutes les libertés fondamentales".
En d’autres termes, un refus d’aménagements n’est justifié que si l’établissement organisateur démontre le caractère "déraisonnable" des aménagements demandés et validés par le médecin.
Bon à savoir
Seule la décision de l’autorité administrative compétente pour ouvrir et organiser l'examen ou le concours peut être contestée, et non l’avis du médecin.
Recours auprès de l’autorité administrative
Si les aménagements d'examens ou de concours sont refusés, totalement ou partiellement, un droit de recours peut être exercé, sous deux modalités possibles :
- un recours gracieux, adressé à l'auteur de l'acte contesté ;
- un recours hiérarchique, adressé à l’autorité hiérarchique de l'auteur de l'acte contesté.
Un recours contentieux peut être envisagé en cas d’échec de ces recours, devant le tribunal administratif.
Recours auprès du Défenseur des Droits
Face à un refus d’aménagements raisonnables, il est toujours possible de saisir le Défenseur des droits.
Un exemple
Une étudiante inscrite en 1ère année de formation au diplôme d’État d’infirmier dans un institut de formations paramédicales demande à bénéficier d’aménagements en raison d’un trouble du calcul et du raisonnement logico-mathématique (dyscalculie). En l’occurrence, outre un tiers temps additionnel et la possibilité de composer dans une salle à effectifs réduits, elle demande à disposer d’outils permettant de pallier sa dyscalculie (formules, tables, fiches outils, notamment un tableau de conversion pour le calcul des doses). Cette demande est validée par le médecin de la CDAPH.
L’institut accorde les aménagements sauf l’usage de formules et fiches outils. L’étudiante saisit alors le Défenseur des Droits.
Par une décision n° 2023-172 du 6 septembre 2023, celui-ci lui a donné raison et a formulé une recommandation à l’égard de l’institut de formation. Il considère que le refus d’un aménagement d’examen dont l’octroi serait justifié par le handicap du candidat, sans que soit démontré le caractère disproportionné de ces aménagements, peut être qualifié de discriminatoire.
Les aménagements obtenus sont-ils définitivement acquis ?
L’article D.613-27-1 du code de l’éducation précise que les aménagements s'appliquent tout au long de la formation qui conduit au diplôme ou titre préparé. Ainsi, par exemple, les aménagements obtenus pour les ECOS valent pour les deux sessions confondues.
En revanche, si le handicap n’est que temporaire (par exemple suite à un accident), ils ne durent que le temps strictement nécessaire, par exemple une année universitaire ou même seulement une session d’examen.
Quelques conseils pour conclure
Les aménagements d’examens répondent à l’objectif, essentiel, d’égalité des chances des étudiants.
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Ce sont aussi de puissants facteurs d’inclusion puisqu’ils garantissent un égal accès aux études et donnent aux étudiants en situation de handicap des armes pour réussir leur cursus.
Pour en bénéficier, voici quelques conseils :
- Dès le début de l’année universitaire, renseignez-vous auprès du service de santé ou du pôle handicap pour réunir le maximum d’informations sur les possibilités d’aménagements et la marche à suivre pour les obtenir. Les établissements sont en principe tenus d’informer les étudiants sur les modalités d’aménagements, à tous les stades de leurs études, mais cette obligation est diversement respectée. Chaque établissement peut aussi avoir ses particularités.
- Le maître-mot est l’anticipation. Les délais sont longs et il peut vous être demandé des pièces médicales qui supposent de consulter son médecin traitant, un médecin spécialiste ou encore un médecin agréé, ce qui n’est pas toujours aisé une fois l’année commencée, d’autant plus pour un étudiant handicapé. Renseignez-vous bien sur les dates butoirs.
- Pour étayer votre demande, veillez à réunir le maximum d’éléments relatifs à votre handicap et à vos besoins spécifiques : certificats médicaux, attestations d’enseignants, etc.
- Ne vous auto-censurez pas ! Si votre handicap limite votre capacité à réussir vos examens, il est parfaitement normal de demander à les aménager pour rétablir une équité avec les candidats valides. Les aménagements ne sont pas une faveur mais un droit qu’il ne faut pas hésiter à faire valoir quand les conditions sont réunies. Si vous éprouvez des difficultés pour révéler votre handicap ou entreprendre les démarches, faites-vous accompagner par un proche, un autre étudiant, voire un enseignant.