En quoi consiste exactement le droit de retrait ?
On parle de « droit de retrait » pour désigner la possibilité offerte à tout agent de quitter son poste de travail s’il considère que sa santé ou sa sécurité sont menacées.
Ce que prévoit la loi
Le droit de retrait, tel que défini dans l’article 5-6 du décret n°82-453 portant sur les agents de la fonction publique (ou dans l'article L4111-1 du code du travail pour les agents de la fonction publique hospitalière), s’exerce dans certaines circonstances strictement définies :
- face à une situation de danger grave et imminent pour la vie de l’agent ou sa santé, telle qu’une menace d’agression physique, un risque d’accident grave, un incident sanitaire ou l’exposition à des produits dangereux sans protection adéquate ;
- en cas de défectuosité des systèmes de protection censés garantir la sécurité et la santé de l’agent sur son lieu de travail, ou en l’absence de système de sécurité pleinement opérant.
Le soignant concerné doit alors alerter immédiatement son ou ses supérieur(s) hiérarchique(s) et se retirer d’une telle situation sans encourir de sanction ni de retenue de salaire.
Combien de temps s’exerce un droit de retrait ?
La Direction de l'information légale et administrative, placée sous l’autorité du Premier ministre, indique que « le salarié peut exercer son droit de retrait et interrompre son activité, jusqu'à ce que l'employeur ait mis en place les mesures de protection adaptées mettant fin à la situation dangereuse. »
La durée d’exercice du droit de retrait dépend par conséquent de chaque situation et de la nature du danger signalé.
Les obligations de l’employeur
L’agent public signale le danger grave et imminent (DGI) ou le dysfonctionnement observé à son chef de service par exemple, ou à l’autorité territoriale dont il dépend. Une fois cette procédure d’alerte déclenchée, ces derniers doivent :
- procéder immédiatement à une enquête ;
- prendre les dispositions qui s’imposent pour remédier au problème ;
- informer de la situation le comité social, c’est-à-dire l’instance représentative du personnel compétente (dans le cadre de la fonction publique hospitalière, il s’agit du CSE, soit « comité social d’établissement »).
Si un désaccord est observé quant à la réalité du danger ou la façon d’y remédier, le comité social doit être réuni dans un délai de 24 heures. L’inspecteur du travail est alors informé de la réunion, à laquelle il peut assister.
L’hôpital, en tant qu’employeur public, décide des mesures à prendre après avis du CSE. En cas de divergence entre le CSE et l’administration sur les mesures à prendre, l’inspecteur du travail est saisi.
Qu’est-ce que le registre des dangers graves et imminents ?
L’agent de la fonction publique hospitalière (FPH) souhaitant exercer son droit de retrait peut également informer un représentant du personnel au comité social. Lequel se chargera alors d’alerter le chef de service et de consigner l’événement dans le “registre des dangers graves et imminents”.
Le poste de travail concerné, la cause et la nature du danger constaté, tout comme le nom du ou des agent(s) exposé(s), doivent y figurer.
La marche à suivre pour faire valoir son droit de retrait
Pour un agent public souhaitant exercer son droit de retrait, la marche à suivre consiste en différentes étapes.
- L’identification du danger
Il convient pour l’agent concerné d’identifier le DGI ou le dysfonctionnement auquel le confronte sa situation de travail. Il est également recommandé de conserver des preuves du danger constaté, lui permettant de justifier sa décision et d’anticiper tout contentieux avec l’employeur (photos, rapports, témoignages, etc.).
- L’alerte à la hiérarchie
Comme indiqué plus haut, l’agent qui fait valoir son droit de retrait doit informer son supérieur hiérarchique du DGI ou du dysfonctionnement qui motive sa décision. Cette alerte doit être donnée sans délai, de préférence par écrit (mail, courrier recommandé).
- Le retrait du lieu de travail
Une fois les deux premières étapes complétées, l’agent public estimant sa santé ou sa sécurité mises en péril a le droit de quitter son poste de travail.
- La mise à disposition
Le droit de retrait n’est pas un congé ; l’agent qui l’exerce est ainsi tenu de rester en contact avec son administration et de se tenir prêt à reprendre ses fonctions de soignant une fois le danger écarté ou le dysfonctionnement résolu.
- La reprise de l’activité
L'autorité administrative ne peut exiger de l’agent ayant fait usage de son droit de retrait de reprendre son activité dès lors que persiste la situation de danger ou de défectuosité. L’agent public ne reprendra son poste qu’une fois les risques levés, sur ordre de sa hiérarchie.
Les limites du droit de retrait
S’il est pleinement encadré juridiquement, le droit de retrait est incompatible avec certaines fonctions. De plus, l’exercice abusif de ce droit de retrait peut faire l’objet de sanctions salariales ou disciplinaires.
C’est notamment le cas de :
- la douane et de la police ;
- l’administration pénitentiaire ;
- la sécurité civile ;
- l’Armée ;
- les sapeurs-pompiers ;
- les agents en fonction dans les missions diplomatiques et consulaires.
Les soignants de la FPH, dès lors qu’ils ne sont pas visés par un tel arrêté, sont autorisés à exercer leur droit de retrait.
Quid de l’utilisation abusive du droit de retrait ?
L’exercice du droit de retrait doit intervenir de manière responsable. En effet, tout abus est susceptible de conduire à une sanction disciplinaire, comme l’ont déjà prouvé plusieurs jurisprudences.
Il peut s’agir, selon les situations, d’une retenue sur salaire pour service non fait, d’une absence considérée comme injustifiée ou encore du non-respect de l’obligation d’obéissance hiérarchique à laquelle sont tenus les agents publics.
Ainsi, l’employeur public estimant son recours abusif peut engager, dans les cas les plus extrêmes, une procédure d’abandon de poste. Celle-ci est susceptible de conduire à un licenciement, comme c’est le cas dans cette décision du Conseil d’État en 2020. L’employeur devra toutefois avoir notifié à l’agent concerné, de façon régulière, une mise en demeure de reprendre le travail.
Des hospitaliers bien protégés avec le contrat RCP-PJ
Vous exercez dans un établissement public ? L’assurance RCP-PJ permet aux hospitaliers une protection étendue grâce à une double garantie : la Responsabilité civile professionnelle (RCP) vous défend en cas de mise en cause par un patient, tandis que la Protection juridique (PJ) vous assiste pour tout litige d’ordre privé ou professionnel, y compris avec votre employeur, et vous fournit des informations juridiques sur vos conditions d’exercice.