Retard d'arrivée du pédiatre d'astreinte à la clinique
Au cours d'un accouchement se produisent de nombreux ralentissements du rythme cardiaque fœtal et de nombreuses oscillations pathologiques, accompagnés de la constatation d'un liquide amniotique teinté.
L'obstétricien, présent sur place, est appelé.
Les anomalies persistant et devenant de plus en plus préoccupantes, une césarienne est décidée en urgence à 14 h 45.
La clinique alerte alors le pédiatre d'astreinte, qui consulte à son cabinet situé à 25 km de l'établissement.
Le pédiatre quitte son cabinet à 15 h 02 et se dirige en voiture vers la clinique.
A 15 h 20, l'enfant naît en état de mort apparente, avec un quintuple circulaire autour du cou, occasionnée par un cordon long de 80 cm.
En l'absence du pédiatre, qui n'est pas encore arrivé sur place, la réanimation est entreprise par la sage-femme, qui pratique une aspiration et une ventilation au masque, puis par l'anesthésiste qui répète ces mêmes gestes, puis intube l'enfant à 3 minutes 30 de vie.
Les manœuvres sont interrompues à 6 minutes de vie et le décès constaté.
Le pédiatre arrivera à la clinique après le décès de l'enfant.
Perte de chance et responsabilité de l'établissement
L'établissement par la clinique d'un tableau de gardes et d'astreintes des pédiatres doit satisfaire à l'obligation que lui fait le décret du 9 octobre 1998, imposant pour les unités de moins de 1 500 naissances par an – ce qui était le cas en l'espèce – un pédiatre dont le délai d'arrivée est compatible avec l'impératif de sécurité.
Il n'existe aucune définition légale ou réglementaire de ce qu'il faut entendre par "compatible avec l'impératif de sécurité".
Les magistrats apprécient cette notion au cas par cas, selon les circonstances des affaires qui leur sont soumises.
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Selon les experts, et dans les circonstances particulières de cet accouchement qui imposaient une intervention en extrême urgence, le délai acceptable pour l'arrivée d'un pédiatre ne devait pas dépasser 10 minutes.
En l'absence d'un système de garde pédiatrique efficace permettant l'intervention d'un pédiatre compétent dans ce délai, l'anesthésiste s'est trouvé contraint d'assurer la réanimation de l'enfant.
Les magistrats estiment que la responsabilité de la clinique est engagée à hauteur de 30 % du préjudice constitué par une perte de chance de survie de 50 %, pour avoir validé un système d'astreinte imposant de parcourir des distances incompatibles avec une intervention d'extrême urgence.
Ce qu'il faut retenir de cette affaire
Il n'existe donc pas de règle absolue, ni en matière de distance, ni en matière de temps d'intervention. La distance en particulier n'est pas en soi un critère : il peut être plus rapide de faire 5 km en milieu rural que 2 km en pleine circulation de ville.
Mais cette affaire rappelle l'importance du délai d'intervention, qui doit être raisonnable et surtout adapté à la complication rencontrée.
Ainsi, en obstétrique où chaque minute compte, un système d'astreinte qui reposerait sur un médecin situé à plusieurs dizaines de kilomètres doit être exclu car, quelles que soient les conditions de circulation et la célérité du médecin, l'impératif de sécurité ne peut être respecté.