Un consentement de principe sur une prothèse… mais pas sur d’autres soins
Un chirurgien-dentiste prend en charge une patiente, présidente d'une association ayant pour objet d'aider les personnes défavorisées à s'appareiller en prothèse dentaire, pour une dent cariée.
Il l’informe de la nécessité de poser une couronne, mais ne la consulte pas sur le choix du type particulier de prothèse qu’il envisage, à savoir une couronne à incrustation vestibulaire.
Après avoir procédé à une obturation canalaire, il pose la couronne en question.
La patiente porte plainte devant la chambre disciplinaire de première instance de l’Ordre des chirurgiens-dentistes. Elle estime n’avoir donné qu’un accord de principe sur la réalisation d’une couronne. Si elle avait été correctement informée sur la prothèse à incrustation vestibulaire, elle l’aurait refusée et aurait plutôt opté pour un autre type.
Quel devoir d’information quand le patient "s’y connaît" ?
La plainte de la patiente est rejetée par la chambre disciplinaire de première instance. Celle-ci considère que le praticien n’a pas manqué à son devoir d’information : les connaissances de la patiente dans le domaine de la santé, et en particulier sur les différents types de prothèses possibles, lui permettaient de ne pas délivrer une information aussi complète que pour un patient profane.
La patiente forme un appel devant la chambre disciplinaire nationale, qui confirme la décision de première instance, pour les mêmes motifs. Elle se pourvoit alors devant le Conseil d'État.
Le Conseil d'État annule la décision de la chambre disciplinaire nationale. La circonstance que la patiente ait eu certaines connaissances en matière de prothèse dentaire n’a pas d’incidence. Le praticien n’était pas pour autant délié de son devoir d'information et de son obligation de recueillir le consentement du patient.
Adapter l’information, oui, s’en passer, non !
L'information peut être adaptée au patient, selon :
- la nature des soins,
- les choix thérapeutiques possibles,
- ses capacités de compréhension.
Il n'en demeure pas moins que sur les risques d'une technique et/ou les choix possibles, elle ne peut être restreinte du seul fait que le patient dispose de compétences plus étendues qu'un profane.
Cette solution, classique, était particulièrement justifiée dans cette affaire : les connaissances de la patiente sur le type de couronne proposé n’étaient que supposées, à partir de ses fonctions au sein d’une association.
Seules l’urgence ou l’impossibilité de consentir peuvent autoriser le praticien à passer outre l’information et la recherche du consentement du patient.
Dans les autres cas, il ne peut se dispenser d’un entretien individuel pour informer de manière loyale, claire et appropriée sur les soins qu’il propose.