Sur quoi porte l’information, que disent les textes ?
L'état de santé du patient
- Présence d’infection dentaire, de fragments d’instruments, de nécrose,...
Les investigations, traitements ou actions de prévention proposées
- Réhabilitation prothétique, traitement orthodontique, soins,…
Le rapport bénéfice/risques
L’utilité des soins ou traitements ou actions de prévention, leur urgence, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles :
- Risques inhérents à la prothèse : inadaptation, esthétique.
- Risques inhérents à des soins : paresthésie suite à une extraction, hémorragie.
- Risques inhérents à un traitement orthodontique (rhizalyses, échec du traitement…).
- Etc.
Les autres solutions possibles
- Réhabilitation prothétique amovible, fixe, ou implantaire,…
- Gouttière ou botox contre le bruxisme.
- Traitement ODF ou chirurgie.
- Etc.
Les conséquences prévisibles en cas de refus de soins
- Dégradation dentaire en cas d’absence de prothèses.
- Infections si refus de détartrage.
- Etc.
Le coût
Non seulement le coût de l’acte en lui-même, mais également les éventuels coûts à venir.
- Par exemple, dans le cas d’une extraction, information à donner sur le coût de l’extraction, mais aussi sur le coût du remplacement de la dent à prévoir.
- Dans le cas de prothèses dentaires, penser à évoquer le coût de la prothèse et de sa pose, mais également la nécessité d’un renouvellement périodique.
Comment délivrer l’information ?
À l'oral
- Obligatoirement.
À l'écrit pour compléter l'oral
- Fiches de consentement éclairé.
- Devis.
- Brochures d’information.
- Schémas explicatifs.
Comment prouver que l’information a été délivrée ? Sur quoi les experts se fondent-ils ?
Le dossier médical
- Devis daté et signé au moins 15 jours avant les soins.
- Echanges oraux retranscrits dans le dossier clinique.
- Nombre de consultations.
- Le patient a déjà fait le même soin auparavant, s’il en fait un second on suppose qu’il est bien informé sur la technique.
Présence du schémas
- Schéma dentaire annoté prouvant que le chirurgien-dentiste a donné des explications au patient.
- Radiographie annotée (par exemple le nerf dentaire surligné sur un cliché avant une extraction montre que le praticien a informé du risque de lésion du nerf).
Rechercher d'un second avis
- Echanges de courriers avec un confrère : proposer au patient de rechercher un second avis lui permet d’appréhender l’acte médical et ses risques et de poser toutes ses questions au praticien et à son confrère.
Présence d’un tiers à la consultation
- Traducteur si le patient ne parle pas bien le français.
- Représentant légal pour un majeur protégé.
- Parent pour un mineur.
Témoignages
- D’autres patients.
- De l’assistant dentaire (valeur relative puisqu’il ou elle est préposé du chirurgien-dentiste employeur).
Exemple de preuve de la bonne information
TGI Paris 22/02/2016 : Mise en cause de la responsabilité de deux chirurgiens-dentistes pour la perte d’un implant posé après un comblement osseux.
Dans cette affaire, la patiente a consulté le praticien le 24 juin 2009 pour remédier à l'agénésie de deux prémolaires. Un devis a été rédigé le 10 juillet 2009 sur la base duquel elle a effectué un paiement partiel.
Une deuxième consultation a eu lieu le 1er septembre 2009 en présence du second praticien et le traitement a commencé le 5 septembre suivant.
Les Juges considèrent que ces consultations multiples et espacées dans le temps permettant la réflexion, le partenariat des deux praticiens devant la prendre en charge, les étapes chiffrées du traitement et les honoraires en partie réglés permettaient à la patiente, secrétaire médicale, d'obtenir toute l'information nécessaire et de poser toutes questions qu'elle estimait nécessaire.
Sa demande fondée sur une absence d'information est rejetée.
Quelles sanctions en cas de défaut d’information ? Quelques exemples
Soins à l'origine d'un déséquilibre de l'occlusion
- Faits
Réalisation d’une couronne et meulage de 3 dents du maxillaire inférieur. Ces soins provoquent un déséquilibre de l’occlusion à l’origine d’une gêne à la phonation. - Décision
Le praticien n’a pas recueilli le consentement de sa patiente pour procéder au meulage de 3 dents. - Sanction
Interdiction d’exercer avec sursis pendant 15 jours. (Chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des chirurgiens-dentistes).
Défaut d'information lors de la dépose d'un bridge
- Faits
1re consultation : diagnostic de caries et de la mobilité d’un bridge. Le praticien préconise la dépose du bridge, l’extraction de la 24 et une réhabilitation prothétique.
2nde consultation 8 jours plus tard : La dépose du bridge et l’extraction de la 24 sont effectuées.
La patiente estime qu’elle n’a pas été informée au préalable que l’intervention consisterait à déposer le bridge et qu’elle risquait de devoir se faire extraire une dent. Surtout, elle estime ne pas avoir été informée du coût de la réhabilitation prothétique ainsi que des modalités de remboursement. - Décision
Il n’est pas rapporté la preuve que la patiente avait été informée. - Sanction
Indemnisation financière (indemnisation du retentissement psychologique et moral du défaut d’information).
Information incomplète sur le traitement d'une parodontolyse
- Faits
Patiente atteinte d’une parodontolyse importante. Le praticien propose d’utiliser les dents restantes comme pilier de bridge. Il n’est pas retrouvé au dossier de devis pour une proposition amovible ou implantaire. Il n’est pas démontré que ces solutions ont été proposées. Il ressort des conclusions d’expertise que seule la solution implantaire était pérenne et que la solution fixe ne pouvait pas être satisfaisante dans le temps. - Décision
Le praticien ne justifie pas avoir donné une information complète sur le traitement adapté à son état bucco-dentaire. - Sanction
Indemnisation financière (indemnisation du préjudice réel et certain causé par le fait de ne pas avoir été informée des différents traitements envisageables et de leurs conséquences).
Insuffisance d'information dans le cadre d'une greffe osseuse
- Faits
Greffe osseuse par prélèvement crânien en vue de la pose d’implants. Désunion de la cicatrice endobuccale, entraînant une infection au niveau du greffon sous-jacent. Le bilan scannographique montre une résorption assez nette d’une partie importante de la greffe osseuse, rendant impossible la mise en place des implants (aléa thérapeutique). Cicatrice crânienne. S’il avait été mieux informé, le patient aurait choisi un prélèvement à la hanche et non crânien. - Décision
Insuffisance d’information sur les risques de l’intervention. Toutefois, il n’est pas démontré que, correctement informé, le patient aurait choisi une autre zone de prélèvement pour sa greffe. - Sanction
Indemnisation financière (indemnisation pour compenser le préjudice lié à l’insuffisance d’information, qui cause en elle-même un préjudice même s’il est probable que, correctement informé, le patient n’aurait pas demandé un autre site de prélèvement pour sa greffe).
Extraction des dents chez une patiente fumeuse
- Faits
Extraction de toutes les dents sauf une, solution implantaire chez une patiente fumeuse (pose de 11 implants). Résorption osseuse et troubles dépressifs. - Décision
Aucun manquement technique, mais pas de preuve que le praticien a suffisamment insisté sur les risque de l’intoxication tabagique sur la durée de vie des implants alors que ce risque est connu et fréquent. - Sanction
Indemnisation financière (somme allouée pour compenser le préjudice lié à l’insuffisance de sensibilisation de la patiente aux risques induits par son tabagisme).
Dossier médical incomplet
- Faits
Nombreux soins entre 2008 et 2017 consistant en des travaux prothétiques et des soins dentaires. A l’occasion d’un litige sur ces actes dentaires, le praticien n’est pas en mesure de remettre à la patiente des éléments sur l’origine de la prothèse qui lui a été posée, et notamment pas la documentation faisant partie de son dossier médical relative à cette prothèse. - Décision
Ce manquement à l’obligation prévue notamment par l’article R. 4127-229 du code de la santé publique constitue une faute. - Sanction
Avertissement (Chambre disciplinaire de première instance de l’ordre des chirurgiens-dentistes de la région Occitanie).
Insuffisance d'information sur les risques lors de soins endodontiques
- Faits
Soins endodontiques sur de nombreuses dents, prothèses et soins conservateurs, qui se sont soldés par des abcès. Le patient a reçu plusieurs devis, lui laissant l’occasion de questionner son praticien. Le dossier dispose d’un consentement éclairé. - Décision
Les Juges considèrent que le consentement ne fait état que de la nécessité de suivre des consignes post-opératoires, sans qu’y soient inventoriés les risques inhérents aux interventions elles-mêmes. L’expert judiciaire considère qu’il y a eu un manque d’information préalable sur les risques encourus, sur les devis et factures. - Sanction
Indemnisation financière (il n’est pas établi que le patient a reçu l’information suffisante à une préparation psychologique à la réalisation du risque subi).
Cas du patient mineur
- Le chirurgien-dentiste doit rechercher le consentement du mineur.
- Pour les actes usuels (détartrage, traitement canalaire,…) : le consentement d’un seul des deux parents est nécessaire, quel que soit le statut juridique du couple (marié, divorcé, concubinage,…).
- Pour les actes non usuels (traitement orthodontique, pose d’implant,…) : le consentement des deux titulaires de l’autorité parentale est exigé.
- En cas de refus de l’un des titulaires de l’autorité parentale : il n’est pas possible de passer outre, sauf si l’abstention emporte des conséquences graves pour la santé du mineur. Il convient alors de ne pas intervenir tout en expliquant au patient et à ses parents les implications du refus de soins.
- En cas d’urgence, lorsqu’il est impossible de recueillir le consentement de l’un des titulaires de l’autorité parentale, le chirurgien-dentiste doit donner les soins nécessaires.