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Devoir d’information et devoir de conseil :
quelle différence ?
- Le devoir d’information consiste à renseigner le patient sur l’acte envisagé pour obtenir son consentement à cet acte particulier.
- Le devoir de conseil consiste à mettre en garde des risques de la maladie et des traitements, qui peuvent avoir des conséquences dans la vie courante et conditionner certaines pratiques (sport, conduite, profession). Il consiste aussi à donner une conduite à tenir en cas de complications (iatrogènes ou liée la maladie).
Cardiomyopathie hypertrophique obstructive chez un adolescent, victime d’une mort subite
Un cardiologue est sollicité à la suite de la découverte d'un souffle chez un adolescent demandeur d’un certificat de sport.
Outre le traitement et la prise en charge proposée, le cardiologue refuse à juste titre de rédiger le certificat de non contre-indication pour la pratique du judo. Mais il est peu explicite sur les consignes habituelles dans le cadre de cette maladie.
Malheureusement, l'adolescent présente une mort subite à l'occasion d'une partie de football entre amis.
La famille reproche l’absence de conseils élargis aux autres activités, au-delà de la seule contre-indication du judo. Aucun écrit de prudence n’est retrouvé dans le dossier.
La responsabilité du cardiologue a été retenue.
Arrêt intempestif de traitement après mise en place d’un stent
Dans la prise en charge de coronaropathies, il n'est pas rare de voir des patients revenir en syndrome coronarien aigu après un arrêt intempestif de tout traitement après mise en place d'un stent. Cet arrêt peut intervenir à la fin de la première ordonnance rédigée à la sortie d'hospitalisation, ou plus tardivement.
Au-delà du conseil oral, qui est quasiment constamment donné par les cardiologues interventionnels lorsqu’un stent vient d'être posé, il est souhaitable que les cardiologues interventionnels et tous les cardiologues en charge de ces patients renouvellent ce conseil de poursuite de la double antiagrégation plaquettaire selon la période prescrite.
De même, il est important de rappeler que la maladie coronaire est une maladie chronique qui nécessite un traitement à vie (antiagrégant, statine,…).
Afin d'amorcer la chaîne information entre les praticiens et avec le patient, le cardiologue interventionnel peut d'emblée utiliser la formule suivante :
"Double antiagrégation plaquettaire avec les molécules suivantes… pour une durée incompressible de X mois. Renouvellement du traitement par le médecin traitant. Toute interruption doit être validée par un cardiologue".
Information insuffisante sur la conduite à tenir en cas de symptômes après un acte invasif
À la suite d'une ablation de fibrillation auriculaire, un patient présente un tableau fébrile avec douleur à la déglutition. Il tente de joindre le service et s’entretient avec un médecin de garde des soins intensifs, sans traçabilité de cet échange.
Une semaine plus tard, le patient présente un tableau septique avec défaillance hémodynamique faisant découvrir une fistule atrio-œsophagienne, une endocardite et un AVC multifocal.
L’expertise ne relève pas de manquement dans l'indication ou la réalisation de l'acte. La complication en elle-même est considérée comme un aléa thérapeutique. En revanche, il est retenu un problème de communication concernant la conduite à tenir en cas d'apparition de symptômes à la suite d'un acte invasif.
Il n'existait pas de document remis au patient avec les numéros de téléphone pour avertir d'une complication.
Ladite complication étant redoutable car les généralistes, urgentistes ou même cardiologues non rythmologues sont peu habitués à la dépister ou la gérer, il semble judicieux que les rythmologues interventionnels expliquent à leur patient ce risque exceptionnel et grave. De même, il est souhaitable de les inviter à reprendre directement contact avec le service de rythmologie.
Pour ce faire, il est de bonne pratique d'organiser une filière pour la gestion de ces appels (hotline) avec :
- une traçabilité des appels,
- un protocole, afin que ces appels soient correctement pris en charge avec une orientation optimale vers le rythmologue interventionnel.
Il est vraisemblable que cela peut permettre un diagnostic plus précoce de ce type de complications et d’optimiser sa prise en charge pour en améliorer le pronostic, souvent effroyable.
Une traçabilité complète pour limiter les risques
Si, en général, les cardiologues informent et conseillent correctement leurs patients concernant l'évolution de la pathologie et les modalités des traitements, il peut leur arriver d’omettre certaines préconisations (activité physique, conduite de véhicules, activité professionnelle, …).
Les patients, souvent submergés par la quantité d'informations reçue, ont de leur côté tendance à oublier certains éléments fondamentaux des consignes à la sortie de la consultation ou d'une hospitalisation.
Pour optimiser la pratique professionnelle, il est souhaitable de s'astreindre à une traçabilité de tous les conseils capitaux délivrés aux patients, afin de se prémunir de reproches ultérieurs.