Survenance d’une pelvipéritonite suite à une ponction ovocytaire
Une patiente souffrant depuis de nombreuses années d’une endométriose sévère et persistante malgré les traitements médicaux et chirurgicaux, fait part à son gynécologue de son désir de grossesse.
Après un bilan d’infertilité, son gynécologue l’oriente vers un protocole de procréation médicalement assistée (PMA) par fécondation in vitro (FIV). Il réalise une ponction ovocytaire sous anesthésie générale.
Quelques jours plus tard survient une pelvipéritonite infectieuse, nécessitant une cure chirurgicale et les conséquences qui en découlent. La patiente assigne le gynécologue, lui reprochant une faute d’imprudence et de négligence pour ne pas avoir refusé l’intervention compte tenu des risques élevés de complications. Elle lui reproche également un défaut d’information à l’origine d’une perte de chance ne pouvant être inférieure à 90%.
Sur le fondement de l’article L1142-1 du code de la santé publique (CSP), le tribunal déboute la patiente de sa demande tendant à voir reconnaître une faute d’imprudence et de négligence.
Il déclare le gynécologue responsable d’un défaut d’information occasionnant une perte de chance de 50 % de limiter les conséquences dommageables du risque qui est survenu. Le gynécologue est également condamné à indemniser la patiente à hauteur de 2 000 € au titre d’un préjudice moral distinct, pour l’avoir privée d’un temps de préparation psychologique à la survenance du risque.
Le gynécologue interjette appel. La Cour d’appel réforme partiellement la décision de première instance.
Aucune faute d’imprudence ou de négligence mais un défaut d’information
La Cour d’appel, dans un arrêt du 21 janvier 2022, confirme l’absence de toute faute d’imprudence ou de négligence du gynécologue sur la réalisation de la ponction ovocytaire malgré les risques plus élevés chez une patiente atteinte d'endométriose. L’indication, la réalisation et le suivi postopératoire ont été conformes aux règles de l’art. La survenance de la pelvipéritonite relève de l’aléa thérapeutique, défini comme un accident médical non fautif.
Le gynécologue soutient devant la Cour d’appel qu’il ne peut exister aucune perte de chance en lien avec la prétendue absence d’information sur les risques majorés de la ponction ovocytaire chez une patiente atteinte d’une endométriose. Ceci d’autant plus que la patiente avait manifesté un fort désir de grossesse dont le seul moyen d’y parvenir était de recourir à une FIV, supposant une ponction d’ovocytes.
L’expert judiciaire le confirmait dans son rapport, en concluant que compte tenu de la détermination de la patiente à mener à terme un projet de grossesse, elle ne pouvait se soustraire à une ponction d’ovocytes malgré les risques.
La Cour d’appel rappelle les termes de l’article L1111-2 du CSP qui dispose que toute personne a le droit d’être informée sur son état de santé.
Cette information porte sur les différentes investigations, traitements ou actions de prévention qui sont proposés, leur utilité, leur urgence éventuelle, leurs conséquences, les risques fréquents ou graves normalement prévisibles qu’ils comportent ainsi que sur les autres solutions possibles et sur les conséquences prévisibles en cas de refus.
En l’espèce, le gynécologue ne conteste pas le principe d’insuffisance d’information mais soutient seulement qu’il ne peut en découler aucune perte de chance pour la patiente.
Indemnisation d’un préjudice autonome en complément de l’indemnisation d’une perte de chance
Indépendamment de la perte de chance d’éviter le dommage, la Cour d’appel retient que :
"Le non-respect du devoir d’information par le professionnel de santé cause à la personne à laquelle cette information était due, lorsque le risque se réalise, un préjudice résultant d’un défaut de préparation aux conséquences d’un tel risque".
Pour la Cour d’appel, il s’agit d’un préjudice autonome d’impréparation pouvant donner lieu à une allocation de 3 000 € en complément de l’indemnisation au titre d’une perte de chance.
Cette décision vient s’inscrire dans la jurisprudence actuelle tendant au cumul de deux indemnités pour un même manquement qui est celui d’un défaut d’information.
Cette affaire vient une nouvelle fois rappeler l’importance du droit à l’information du patient.
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