Les astreintes, rouage essentiel de la permanence des soins
L’article R6152-28 du Code de la santé publique rappelle que les médecins et odontologistes régis par la présente section ont la responsabilité médicale de la continuité des soins, conjointement avec les autres membres du corps médical de l'établissement.
À ce titre, ils doivent en particulier :
- Dans les structures organisés en temps continu, assurer le travail de jour et de nuit dans les conditions définies par le règlement intérieur et le tableau de service.
- Dans les autres structures, assurer le travail quotidien du matin et de l'après-midi ; en outre, ils participent à la continuité des soins, ou à la permanence pharmaceutique organisée soit sur place, soit en astreinte à domicile.
Les astreintes s'entendent des périodes de travail réalisées soit à domicile, soit dans tout autre lieu au choix du médecin hospitalier à condition qu'il soit joignable en permanence et qu'il puisse intervenir dans les plus brefs délais.
L'astreinte peut donc donner lieu à déplacement. Elle prend la forme :
- d'une astreinte opérationnelle dans les activités qui peuvent donner lieu régulièrement à des appels ;
- d'une astreinte de sécurité dans les activités qui ne donnent lieu qu'à des appels peu fréquents.
Modalités d’indemnisation et de comptabilisation dans les obligations de service
La prise en compte du temps de travail réalisé au cours d'une période d'astreinte a connu une évolution récente.
Auparavant, le temps de travail réalisé au cours des astreintes n'était pas comptabilisé dans les obligations de service du médecin hospitalier. Il constituait néanmoins du temps de travail effectif et faisait l'objet d'une indemnisation ou, le cas échéant, d'une conversion en temps de travail additionnel.
Désormais, le temps effectif d'intervention sur place et de trajet réalisé au cours de l'astreinte fait l'objet, au choix du praticien, d'une intégration dans ses obligations de service ou d'une rémunération.
Comptabilisation essentielle du temps d'astreinte pour intégration ou indemnisation
Pour pouvoir être intégré dans les obligations de service ou indemnisé, le temps de travail résultant des astreintes doit être comptabilisé.
Pour cela, il est indispensable de procéder à la tenue d'un suivi des déplacements.
Chaque praticien effectuant une astreinte à domicile enregistre, selon des modalités arrêtées par le directeur, sur proposition de la commission relative à l'organisation de la permanence des soins, les informations suivantes :
- l'heure de l'appel reçu au cours de l'astreinte,
- ses heures d'arrivée et de départ de l'hôpital,
- le nom de chaque malade soigné et, par référence à la nomenclature des actes médicaux, l'indication des soins dispensés.
Ces informations doivent être transmises au directeur à la fin de chaque mois.
L'indemnisation et la comptabilisation du temps de soins et celle du temps de trajet sont différenciées
En effet, avant l'intervention de l'arrêté du 8 novembre 2013 modifiant l'arrêté du 30 avril 2003, l'indemnisation des astreintes se faisait de la manière suivante.
Pour chaque astreinte effectuée, le praticien percevait :
- une indemnité forfaitaire de base dont le montant différait selon qu'il s'agissait d'une astreinte opérationnelle ou d'une astreinte de sécurité, versée même en l'absence de déplacement ;
- une indemnité forfaitaire de chaque déplacement dont le montant était identique quel que soit le type d'astreinte.
Les indemnités versées au titre d'une astreinte opérationnelle ou d'une astreinte de sécurité ne pouvaient excéder le taux fixé pour une période de temps de travail additionnel de nuit.
Lorsqu'au cours d'une astreinte, le temps de déplacement atteignait une durée effective d'au moins 3 heures, l'indemnisation de l'astreinte et du déplacement était remplacée par une indemnisation calculée sur la base d'une demi-période de temps additionnel de nuit, de dimanche ou de jour férié.
Par dérogation, le directeur de l'établissement pouvait, après avis de la commission médicale d'établissement, décider, pour une structure donnée, la mise en place d'une indemnisation forfaitaire, au plus égale au montant d'une demi-indemnité de sujétion augmenté de l'indemnité de base et recouvrant les éventuelles indemnités de déplacement quel qu'en soit leur nombre.
Ce dispositif donnait lieu à un contrat annuel renouvelable, passé entre le responsable de la structure et le directeur, dans le respect de l'enveloppe allouée à l'établissement pour le financement de la permanence des soins au titre du budget de l'année et sous réserve d'une diminution des permanences sur place.
Désormais, le décompte du temps d'intervention et du temps de trajet se fait de la manière suivante :
- Le temps d'intervention sur place est décompté en heures à hauteur du temps réellement effectué (d'où l'importance de la tenue du registre des déplacements). Les fractions inférieures à la demi-heure sont négligées et les fractions supérieures à la demi-heure sont comptées pour une heure.
- Le temps de déplacement est décompté forfaitairement pour une heure aller-retour et plafonné à 2 heures pour l'ensemble de l'astreinte quel que soit le nombre de déplacements (plafonné à une heure pour les demi-périodes d'astreinte).
Modalités de décompte des astreintes
Limite de décompte global et système d'équivalence
Le décompte global de l'intervention et du déplacement au cours d'une astreinte ne peut pas dépasser deux demi-journées.
Le décompte se fait en heures et les modalités d'indemnisation du temps passé en déplacement (temps de soins et temps de trajet) sont fondées sur un système d'équivalence :
- chaque plage de 5 heures correspond à une demi-journée ou une demi-période de temps de travail additionnel ;
- le reliquat d'heures inférieures à 5 heures est reporté sur le quadrimestre suivant.
Choix du praticien et formalisation
Le Ministère des affaires sociales et de la santé précise que ce système d'équivalence est mis en place exclusivement pour les astreintes et n'est pas transposable au décompte du temps de travail sur place.
Par conséquent, le texte ne fixe pas à 5 heures la durée de la demi-journée d'obligation de service.
Le temps effectif d'intervention et de trajet, converti en plage de 5 heures est, au choix du praticien, intégré dans ses obligations de service ou rémunéré.
Ce choix est exprimé en début d'année et formalisé, le cas échéant, dans le contrat de temps de travail additionnel.
Indemnisation des astreintes
L'indemnité forfaitaire de base des astreintes correspondant à la sujétion téléphonique reste inchangée.
À cette indemnité s'ajoute l'indemnité suivante :
- Si la plage de 5 heures est intégrée dans les obligations de service, celle-ci est convertie en demi-journée. Le praticien perçoit alors une demi-indemnité de sujétion.
- Si la plage de 5 heures est rémunérée, celle-ci est convertie :
- En demi-période de temps de travail additionnel de jour si les établissements parties au groupement hospitalier ont adopté un schéma territorial de la permanence et de la continuité des soins organisé et coordonné au niveau du groupement hospitalier de territoire.
- En demi-période de temps de travail additionnel de nuit à défaut de l'adoption du schéma territorial de la permanence des soins et de la continuité.
Par dérogation, lorsqu'un déplacement fait l'objet de 3 heures d'intervention sur place, il est décompté comme suit :
- Si la plage de 3 heures est intégrée dans les obligations de service, celle-ci est convertie en une demi-journée. Le praticien perçoit alors une demi-indemnité de sujétion.
- Si la plage de 3 heures est rémunérée, celle-ci est convertie en une demi-période de temps de travail additionnel et rémunérée selon les mêmes modalités que celles précisées ci-dessus.
Versement des indemnités et bilan quadrimestriel
Quel que soit le choix du praticien, le versement des indemnités de sujétion intervient mensuellement, sur la base des déplacements comptabilisés et convertis en plages de 5 heures.
À l'issue du quadrimestre, le bilan des plages à comptabiliser dans les obligations de service ou des plages à rémunérer sous forme de temps de travail additionnel est établi en tenant compte du temps de travail réalisé et des périodes de repos quotidien effectif.
Rémunération et récupération du temps de travail
Lorsque le praticien choisit la rémunération sous la forme de temps de travail additionnel, il reste à verser au praticien la différence entre les demi-périodes de temps de travail additionnel dues et les demi-indemnités de sujétion déjà versées mensuellement, sous réserve qu'il ait accompli ses obligations de service.
Lorsque le praticien a choisi l'intégration dans les obligations de service et l'indemnisation au titre de la sujétion, les versements des demi-indemnités de sujétion dues ont été effectués mensuellement ; il reste à comptabiliser le temps de travail réalisé pendant les astreintes dans les obligations de service. Ce temps sera donc du temps à récupérer.
Possibilité de forfaitisation
Par dérogation, le directeur de l'établissement peut, après avis de la commission médicale d'établissement, décider, pour une structure donnée, la mise en place d'une indemnisation forfaitaire de l'astreinte opérationnelle ou de l'astreinte de sécurité, au plus égale au montant d'une demi-indemnité de sujétion augmenté de l'indemnité de base et recouvrant les temps de déplacement, temps de trajet compris, quel que soit le temps passé en déplacement.
Ce dispositif donne lieu à un contrat annuel renouvelable, passé entre le responsable de la structure et le directeur, dans le respect de l'enveloppe allouée à l'établissement pour le financement de la permanence des soins au titre du budget de l'année et sous réserve d'une diminution des permanences sur place.
Une évaluation annuelle du dispositif est réalisée par le directeur et la commission relative à l'organisation de la permanence des soins dans le cadre de la préparation du compte administratif. Sur la base de cette évaluation, le contrat peut être reconduit.
Le directeur la transmet chaque année au conseil de surveillance et au directeur de l'ARS.
Obligation de décompte du temps d'intervention
Cette possibilité de forfaitisation n'exonère pas le directeur de l'établissement de la tenue du décompte du temps d'intervention réellement passé, indépendamment du forfait fixé.
Ce décompte reste nécessaire de façon à vérifier le non-dépassement de la durée maximale de temps de travail hebdomadaire de 48 heures et d'intervenir si la santé et la sécurité des praticiens sont affectées.
Par conséquent, ce temps d'intervention doit donc être décompté dans les obligations de service mais ne peut faire l'objet d'aucune autre forme d'indemnisation.
Permanence des soins : les limites générales et spécifiques
Enfin rappelons qu’en application de l’article 10 de l’arrêté du 30 avril 2003 relatif à l'organisation et à l'indemnisation de la continuité des soins, modifié par arrêté du 5 février 2022 :
Pour les personnels enseignants et hospitaliers, un même praticien ne peut être de permanence sur place pendant plus de 24 heures consécutives. Un même praticien ne peut, sauf nécessité impérieuse de service et à titre exceptionnel, être mis dans l'obligation d'assurer une participation supérieure à :
- une nuit par semaine, sous forme de permanence sur place, ou trois nuits par semaine, sous forme d'astreinte à domicile, ou deux demi-nuits suivies de deux demi-astreintes par semaine ;
- un dimanche ou jour férié par mois, sous forme de permanence sur place, ou deux dimanches ou jours fériés par mois, sous forme d'astreinte à domicile.
Mais il peut, à titre volontaire, dépasser ces normes dans les limites compatibles avec la bonne exécution de son service normal de jour.
Les praticiens hospitaliers, les praticiens contractuels, les assistants, les praticiens attachés et les praticiens adjoints contractuels ne peuvent assurer une participation sous forme d'astreinte supérieure à :
- trois nuits par semaine ou deux demi-astreintes suivant deux demi-périodes de permanence sur place par semaine ;
- deux dimanches ou jours fériés par mois.
Mais ils peuvent, à titre volontaire, dépasser ces normes dans les limites compatibles avec la bonne exécution de leur service quotidien.
Les assistants associés et les praticiens attachés associés ne peuvent pas effectuer d'astreintes à domicile.
Cas particuliers
Ne participent pas à la permanence des soins de nuit, samedi après-midi, dimanche et jour férié :
- sur avis du médecin du travail, les praticiens accomplissant leur service à mi-temps pour raison thérapeutique qui peuvent demander à en être dispensés ;
- les praticiens qui font l'objet d'une décision temporaire de cessation de participation, conformément à leurs statuts.
Les praticiens peuvent être dispensés par le directeur de leur participation à la permanence des soins de nuit :
- à compter de l'âge de soixante ans, pour les praticiens qui présentent une demande motivée et sous réserve des nécessités de service sur avis du responsable de la structure et de la commission de l'organisation de la permanence des soins ;
- sur avis du médecin du travail, pour les femmes enceintes à compter du troisième mois de grossesse et pour les praticiens dont l'état le nécessite.