Responsabilité du vétérinaire praticien lors de la prescription et la délivrance de médicaments
Responsabilité du vétérinaire praticien lors de la prescription et la délivrance de médicaments
Michel BAUSSIER, Docteur vétérinaire
Le 18.11.2018
Le vétérinaire praticien doit faire face, dans son exercice, à la complexité d’une réglementation, relativement souvent modifiée, répartie entre le code rural et de la pêche maritime (CRPM) et le code de la santé publique (CSP), lors de la prescription et de la délivrance des médicaments pour les animaux.
Le vétérinaire praticien doit faire face, dans son exercice, à la complexité d’une réglementation, relativement souvent modifiée, répartie entre le code rural et de la pêche maritime (CRPM) et le code de la santé publique (CSP), lors de la prescription et de la délivrance des médicaments pour les animaux.
Les trois responsabilités du vétérinaire praticien peuvent être mises en cause
Cette activité courante est de nature à mettre en cause sa responsabilité civile certes, mais aussi et surtout sa responsabilité disciplinaire (déontologique) ainsi que, avec des conséquences qui peuvent être graves, sa responsabilité pénale. Ces différentes responsabilités peuvent être invoquées isolément ou cumulativement. Les sanctions pénales pour les infractions au code de la santé publique ont été considérablement majorées ces dernières années, notamment dès lors que les médicaments renferment des substances vénéneuses et notamment des antibiotiques.
L’Ordre national des vétérinaires, dans son rapport annuel d’activité pour 2017, fait état (p.19) de sa gestion des dossiers pénaux (tribunaux correctionnels) et souligne que 40% de ces dossiers ont trait à la pharmacie vétérinaire (délivrance de médicaments vétérinaires en tenant officine ouverte, prescription de médicaments vétérinaires à des animaux auxquels le vétérinaire ne donne pas personnellement de soins ou pour lesquels le suivi sanitaire permanent ne lui est pas confié, prescription sans suivi sanitaire permanent effectif…).
Les mises en cause et les poursuites n’ont plus le caractère d’exception qu’elles avaient par le passé.
Il convient d’alerter les consœurs et confrères sur les points critiques de leur activité liée au médicament afin qu’ils évaluent leurs pratiques (auto-évaluation, par exemple en utilisant l’outil du Guide de bonnes pratiques du médicament mis en ligne par QUALITEVET), qu’ils approfondissent leur formation en matière de connaissance de la législation et de la réglementation et qu’ils modifient en conséquence leurs éventuelles pratiques devenues inadaptées et dangereuses. Cela afin de leur éviter la mise en cause de leur responsabilité au travers de poursuites devant les tribunaux correctionnels par les autorités en charge de l’application de la loi pénale.
Points critiques en matière de prescription de médicaments vétérinaires
En matière de prescription, on pourrait résumer le point critique essentiel en indiquant au praticien que, dans chaque cas de prescription, il doit toujours se demander s’il a réellement été ou non en situation de réaliser préalablement - en satisfaisant son obligation de moyens - un diagnostic vétérinaire. Pas de prescription sans diagnostic préalable ! C’est le principe, c’est le dogme, c’est la règle.
La loi pénale s’intéresse surtout aux substances réglementées (telles que les anabolisants et les bêta-agonistes) visées à la fois par le CRPM et le CSP et aux substances vénéneuses visées par le CSP. En fait près de neuf prescriptions sur dix comprennent des substances vénéneuses et sont donc concernées ! Prescrire des médicaments renfermant ces substances sans que notamment les conditions réglementaires du diagnostic vétérinaire, telles que fixées dans le code de déontologie vétérinaire (articles R 242-43 et 44 du CRPM), ne soient remplies, expose à des déconvenues sévères au titre de l’article R 5442-1 du CSP (contraventions) ou, pire, au titre de l’article L 5432-1 du même CSP (délits passibles de 5 à 7 ans d’emprisonnement et d’amendes allant de 375 000 à 750 000 € dans le cas de médicaments renfermant des substances vénéneuses). Prescrire sans satisfaire aux modalités de rédaction de l’ordonnance telles que prévues à l’article R 5141-111 du CSP expose aux amendes prévues à l’article R 5442-1 susmentionné. Un déficit de formalisme peut ainsi être très pénalisant.
Points critiques en matière de délivrance de médicaments vétérinaires
La délivrance obéit à un formalisme rigoureux en matière de traçabilité des médicaments délivrés (article R 5141-112 du CSP). Les infractions (contraventions) sont sanctionnées par le même article R 5442-1 précédemment cité. Elles peuvent dans certains cas (délits relatifs aux médicaments renfermant des substances vénéneuses) être encore plus lourdement sanctionnées par l’article L 5432-1 précédemment cité également.
Tenir officine ouverte pour un vétérinaire (délivrer un médicament pour un animal non examiné ou provenant d’un élevage qui ne serait pas en réel suivi sanitaire permanent) est sanctionné par l’article L 5442-1 de deux ans d’emprisonnement et d’une amende de 30 000 €.
La sollicitation de commandes est punie des mêmes peines.
Bien connaître ces points critiques au regard de la loi pénale vaut en réalité une première bonne assurance dans tous les domaines de sa responsabilité en matière de prescription et de délivrance des médicaments vétérinaires.
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