Une injection pour une IRM qui se complique
Un patient passe une IRM cérébrale dans le service de radiologie d'un hôpital privé.
Dans les suites, il présente un gonflement du bras gauche dans lequel le produit de contraste a été injecté et des douleurs au bras, au cœur et au thorax.
Un électromyogramme révèle une tendinite qui nécessite des séances de massage et de rééducation fonctionnelle du rachis cervical et dorsal ainsi que des membres supérieurs.
Le patient assigne le radiologue libéral et le manipulateur en électroradiologie médicale salarié.
Que s'est-il passé, selon l'expert ?
Selon le rapport d'expertise, l'injection du produit de contraste a été rendue difficile par un mauvais état veineux. Il s’est produit une extravasation dans les parties molles au voisinage du point de ponction. Ce phénomène s'explique, soit par la blessure de la veine lors de la ponction, soit par son éclatement lors de l'injection. Cette extravasation a entraîné un hématome des parties molles qui a mis deux mois à se résorber et une atteinte des tendons des muscles palmaires, avec une perte de force musculaire du bras gauche, en partie récupérée.
Dans les suites de cette extravasation, un pansement alcoolisé a été réalisé mais le patient n'a pas été revu par le radiologue à l'issue de l'examen, alors pourtant que celui-ci avait été informé de la complication par le manipulateur radio. Le radiologue n'a pas non plus constaté la gravité potentielle des lésions et n'a pas noté cet événement indésirable dans le compte-rendu d'intervention. Enfin, il n'a pas informé le patient ni le médecin traitant.
En première instance, le patient est débouté de toutes ses demandes. Le tribunal considère qu'il ne rapporte pas la preuve d'un lien de causalité entre le dommage allégué et les manquements reprochés au radiologue.
Le patient interjette alors appel.
Mise hors de cause du manipulateur radio
La Cour d’appel commence par rappeler que l'extravasation d'un produit de contraste est exceptionnelle puisqu'elle correspond à un risque estimé entre 0,04 % et 0,9 %. Il s'agit d'un aléa thérapeutique.
Le manipulateur en électroradiologie médicale a bien suivi les recommandations de la Société de Radiologie française selon lesquelles un produit de contraste de faible charge osmotique doit être utilisé en cas de mauvais état veineux ou de faiblesse du tissu sous-cutané. En l’espèce, le manipulateur a bien pris soin de diluer le produit avec du sérum physiologique.
Aucune faute ne lui est donc imputable et sa responsabilité n’est pas engagée.
Condamnation du radiologue
Le radiologue, alors qu’il avait pourtant été averti de l’extravasation par le manipulateur radio, ne s'est pas déplacé pour en apprécier l'existence et l'ampleur et a demandé la mise en œuvre d’un traitement - le pansement alcoolisé - qui n'a pas prouvé son efficacité. Il aurait été préférable de réaliser une hypothermie par application de glace.
De plus, le radiologue n'a pas attiré l'attention de son patient sur les risques et les conséquences d'une extravasation, pas plus qu’il n’a averti le médecin traitant, ce qui aurait pourtant permis de mettre en place un traitement plus adapté.
L'expert ayant relevé que les manquements constatés n'ont pas changé significativement l'évolution des lésions, la Cour d’appel retient à l’encontre du radiologue une perte de chance de 10 % d'échapper au risque qui s’est réalisé.
Que retenir de cette affaire ?
Cette affaire rappelle des principes qui sont simples mais qui peuvent être un peu perdus de vue lorsque l’on est pris dans le flux d’une pratique quotidienne intense.
- Quand il est informé par le manipulateur radio d’une difficulté, le radiologue doit se déplacer pour constater personnellement les complications. En effet, il doit garder à l’esprit que le manipulateur radio exerce sous sa responsabilité, comme le rappelle l’article L. 4351-1 du code de la santé publique (CSP). Même si, depuis des modifications législatives et réglementaires intervenues en 2016, il n’est plus question de contrôle ou d’intervention immédiate du radiologue, ce dernier se doit néanmoins de s’assurer du bon déroulement des soins quand il est averti d’un problème.
- En cas de complication, le radiologue doit en informer loyalement le patient, ainsi d'ailleurs que le médecin traitant. Cela permet non seulement d’alerter le malade sur les signes qui doivent éventuellement l’inquiéter et l’amener à consulter, mais aussi de mettre en place ou de réadapter la prise en charge adéquate.