Une IRM cérébrale suivie de troubles auditifs invalidants
Un patient de 28 ans bénéficie d’une IRM cérébrale au sein d’une clinique au cours d’un séjour dans le service de médecine interne pour bilan de myoclonies des membres supérieurs non objectivées.
Lors de l’IRM, il est équipé d’un simple casque audio et dit avoir subi un traumatisme sonore aigu important : il a ressenti une vive douleur et des acouphènes à l’oreille gauche.
Devant la persistance des plaintes, il est vu un mois plus tard par un ORL qui ne retrouve pas d’anomalie à l’examen clinique. L’audiogramme est normal, l’IRM cérébrale sans particularité. Le spécialiste rassure son patient quant à la bénignité de son acouphène.
Peu de temps après, un psychiatre atteste d’un état de stress post-traumatique nécessitant une prise en charge hebdomadaire.
Le patient allègue :
- des acouphènes intenses et permanentes ;
- une insomnie chronique ;
- une dépression avec idées suicidaires ;
- des difficulté de concentration ;
- une sensation d’oreille bouchée et de pression au niveau des oreilles engendrant un état d’anxiété permanent.
Il engage une procédure amiable pour indemnisation des préjudices subis.
Quelles sont les protections auditives recommandées ?
Pour rappel, l’IRM est une procédure… bruyante ! La machine génère claquements et grondements, bruits que produisent les aimants durant les séquences d’acquisition des images.
Un casque - proposé systématiquement - diffuse une musique audible entre les séquences et amoindrit le bruit généré par l’appareil. Certaines personnes préfèrent porter des bouchons d’oreille.
Dans tous les cas, ce bruit, même s’il est impressionnant, est sans danger pour les tympans.
Le décret n° 2022-1238 du 16 septembre 2022, relatif aux conditions de fonctionnement des équipements matériels lourds d’imagerie et de l’activité de soins de radiologie interventionnelle, rappelle que "le titulaire de l’autorisation d’imagerie en coupes dispose des installations nécessaires au bon fonctionnement de l’équipement dans le respect des règles de sécurité des soins."
Il est indiqué, à propos de ces conditions de réalisation, qu’une protection auditive peut être proposée aux patients, sans que celle-ci ne soit obligatoire.
Que dit la littérature ?
La littérature scientifique présente des résultats divergents.
Pour certains, une perte auditive est impossible. Pour d’autres, chez le cobaye, des pertes de l’ordre de 2 dB sont systématiques après 30 minutes passées dans la machine.
En réalité, cette perte correspond plutôt à une fatigue auditive, qui régresse dans les 24 heures sans donner de perte définitive.
Sachant que :
- la durée d’une IRM cérébrale est de 15 à 20 minutes, que le niveau d’intensité sonore (en dBA) des séquences d’IRM peut atteindre des pics en-dessous de 120 dB maximum (Counter et al, 1997) avec un niveau moyen en-dessous de 95 dB ;
- le constructeur du casque précise que celui-ci a une atténuation de 13 dB ;
- le seuil lésionnel d’un bruit continu est de 120 dB (Eliott et al, 2019) ;
- une étude analysant les seuils auditifs en suivi longitudinal de patients ayant eu des IRM à répétition a montré qu’il existe, peut-être, une dégradation légère des seuils au niveau de l’oreille (Bongers et al, 2017).
Si l'on se réfère à la législation du travail (Article R4434-1 à R4434-6 du Code du travail) et au tableau d'isoénergie : 95 dB pendant 15 minutes équivalent à 92 dB pendant 30 minutes / 89 dB pendant 1 heure / 86 dB pendant 2 heures / 83 dB pendant 4 heures / 80 dB pendant 8 heures.
Ce n'est qu'à partir de 80 dB pendant 8 heures ou 135 dB en niveau de crête que l'on commence à mettre à disposition des actions de prévention (protections auditives individuelles) par l’employeur, sans que les travailleurs ne soient obligés de les porter.
Ainsi, on peut conclure qu’un traumatisme sonore aigu dans les suites de l’IRM est peu probable, dès lors que le patient était équipé d’un casque de protection, même si cela ne peut être totalement exclu (Berger et al, 2019).
Sur le plan médico-légal
Les médecins conseils désignés pour une expertise amiable contradictoire ont fait le choix de conclure en un aléa thérapeutique, sans manquement fautif de la part du radiologue.