Un constat : comme chez l’adulte, le Covid peut durer chez l’enfant…
Des parents désemparés se sont heurtés à l’embarras, si ce n’est l’incrédulité de certains médecins lorsque l’hypothèse du Covid long leur était suggérée pour tenter d’expliquer le brutal et durable changement de comportement ou de performances de leur enfant après avoir contracté le Covid. Et ce, alors que cette affection avait jusqu’à présent été présentée comme, dans l’immense majorité des cas, asymptomatique ou, au pire, bénigne et de toute façon rapidement résolutive.
Rappelons en effet que déjà, les cas de Covid graves restent exceptionnels chez l’enfant. Un communiqué de Santé Publique France2 rapportait "seulement" 2 433 jeunes patients de moins de 18 ans hospitalisés entre janvier 2021 et janvier 2022 et 86 enfants hospitalisés en réanimation du 30 août au 9 septembre 2022.
Comparée à celle observée chez l’adulte, la mortalité est finalement faible chez l’enfant puisque seulement 30 enfants sont décédés en France de la Covid-19 depuis le début de la pandémie, dont :
- 13 avaient moins de 5 ans,
- 5 avaient entre 5 et 11 ans,
- 12 avaient entre 12 et 17 ans.
Pour autant, comme chez l’adulte, est apparu le fait que l’infection puisse durer au-delà des classiques quatre semaines délimitant la Covid aiguë et que des enfants puissent présenter de manière persistante des symptômes au-delà de douze semaines, que nuls autres diagnostic ou situation ne venaient expliquer…
Si on ne connaît toujours pas bien les mécanismes physiopathologiques pouvant expliquer ces formes "prolongées" (il a été évoqué le rôle de cytokines pro inflammatoires), les nombreux cas rapportés tendent à prouver leur existence. Même si on remarquera que la HAS elle-même préfère le qualificatif de "formes prolongées" chez l’enfant à celui de Covid long, qu’elle utilise sans réserve pour l’adulte…
Que disent les études ?
Peu d’études pédiatriques étaient jusqu’à présent disponibles et elles étaient de surcroît difficiles d’interprétation car comportant des biais méthodologiques.
Une récente étude britannique3 menée par le biais de questionnaires concernant 6 000 enfants a pu montrer que seulement 1 % des enfants âgés de 5 à 11 ans souffraient de Covid "long" contre 2,7 % de ceux âgés de plus de 11 ans, et que la majorité de ceux-ci avaient d’ailleurs contracté une infection bénigne n’ayant pas nécessité leur hospitalisation.
D’après ces études, comme chez l’adulte, les symptômes compatibles avec un Covid long sont variés, non spécifiques et dominés en termes de fréquence par une asthénie persistante parfois très profonde (des cas d’hypersomnie diurne sont rapportés) ayant un fort impact sur la scolarité comme sur les loisirs de ces enfants. Asthénie que ne viendraient pas expliquer des troubles psychologiques antérieurement méconnus ou secondaires à des problèmes familiaux ou tout simplement au stress induit par la crise sanitaire et les confinements successifs...
La HAS rappelle que de nombreux autres symptômes peuvent également être rattachés à une infection par la Covid "Fatigue, maux de tête, troubles du sommeil, difficultés de concentration, douleurs articulaires diffuses, douleurs abdominales, intolérance à l’effort, vertiges, douleurs thoraciques, ou encore perte de poids et toux prolongée, ces signaux sont nombreux et souvent associés".
Quelles sont les recommandations de la HAS aux médecins traitants ?
Si la HAS recommande de ne pas trop rapidement imputer ces symptômes à des troubles psychologiques ou à une adolescence difficile, attitude souvent très mal vécue par l’entourage…, elle insiste aussi et surtout sur la nécessité d’un examen clinique rigoureux et d’éliminer par des examens une autre origine possible afin d’éliminer en premier lieu une complication de l’infection passée inaperçue (notamment péricardite et myocardite) ou toute autre maladie intercurrente.
Pour aider les médecins traitants, la HAS leur propose de :
- Définir des objectifs propres à chaque patient selon ses capacités en s’intéressant aux différents domaines de sa vie quotidienne : scolaire, social, loisirs, pairs, sport, activité physique, vie familiale.
- Réguler ses différentes activités en adaptant le rythme de l’activité et du repos, en ayant recours si possible à la rééducation à l’effort respectant les capacités de l’enfant, la régulation du sommeil et de l’alimentation.
- Soutenir l’enfant et sa famille, grâce à l’écoute du médecin traitant et si nécessaire un soutien psychologique.
- Limiter l’impact social avec une adaptation souple et évolutive de la vie quotidienne et parfois un aménagement du temps scolaire et de l’activité physique.
- Prescrire, en fonction des symptômes et, si nécessaire, des traitements médicamenteux (traitement symptomatique, traitement psychotrope en collaboration avec un pédopsychiatre).
Enfin, parce que les symptômes présentés peuvent être nombreux et intéresser plusieurs appareils, l’accent est mis sur la nécessité d’une prise en charge spécialisée parfois multidisciplinaire à visée rééducative notamment (respiratoire, olfactive, réentrainement à l’effort…) en ne négligeant pas l’apport d’un soutien psychologique spécialisé dont on imagine bien qu’il puisse aussi concerner les parents !