Quelles sont les circonstances dans lesquelles l'interne peut recevoir délégation ?
La jurisprudence a défini les circonstances dans lesquelles l'interne pouvait valablement recevoir délégation pour réaliser un acte :
"Considérant qu'il résulte des prescriptions précitées qu'en dehors de cas de force majeure où l'intervention de l'interne s'impose, en raison de l'urgence, en l'absence des chirurgiens et de leurs assistants, ceux-ci ne peuvent régulièrement se décharger sur leurs internes de l'obligation qui incombe à ces praticiens d'opérer personnellement que lorsqu'une telle délégation n'est pas exclue par l'importance de l'opération et qu'ils se sont, d'autre part, assurés, au préalable, dans chaque cas et sous leur responsabilité, que l'autorisation exceptionnelle ainsi donnée à leurs collaborateurs n'est susceptible de porter aucune atteinte aux garanties médicales que les malades sont en droit d'attendre du service chirurgical des établissements hospitaliers publics" (Conseil d'État, 18 décembre 1953).
Il en résulte deux critères essentiels :
- Le caractère courant de l'intervention
Le praticien ne peut déléguer à l'interne qu'un acte ne présentant pas de difficulté sérieuse. Une intervention d'une gravité particulière ne peut faire l'objet d'une délégation.
- L'appréciation des capacités de l'interne
Il s'agit de l'élément le plus problématique car il suppose une évaluation au préalable. Le praticien doit en effet s'être assuré que la délégation "n'est susceptible de porter aucune atteinte aux garanties médicales que les malades sont en droit d'attendre".
La délégation pour réaliser un acte doit-elle faire l'objet d'un écrit ?
Il n'est pas nécessaire que la délégation fasse l'objet d'un écrit.
Toutefois, dans l'hypothèse d'une mise en cause, un tel document précisant la nature des actes confiés peut s'avérer précieux.
En cas d'urgence
En cas d'urgence, l'intervention de l'interne s'impose en l'absence du chef de service ou d'un de ses collaborateurs qualifiés.
Il s'agit d'une obligation légale pour l'interne, son abstention le rendant passible de poursuites sur le fondement de la non-assistance à personne en péril (article 223-6 CP).
Néanmoins, une circulaire administrative du 22 novembre 1974 enjoint aux internes, même en cas d'urgence, de mettre en œuvre tout moyen pour joindre le chef de service ou son assistant.
Si la demande de délégation est licite, quelle responsabilité est engagée ?
Si la délégation est licite, c'est-à-dire justifiée par la nature de l'acte délégué et les compétences de l'interne, la responsabilité du service public hospitalier est susceptible d'être engagée sur le fondement de la faute de l'interne.
Par exemple, la méconnaissance d'une fracture du crâne lors de l'examen d'un patient ivre.
Lorsque la délégation est injustifiée...
Si la délégation est injustifiée, l'interne s'étant vu confier un acte d'une particulière difficulté ou ne pouvant être exécuté au regard de ses connaissances, la responsabilité du service public hospitalier est susceptible d'être retenue sur le fondement du défaut d'organisation du service.
Cette situation peut résulter notamment d'une mauvaise appréciation des capacités de l'interne.
Par exemple une appendicectomie confiée à un interne qui ne disposait pas des capacités requises.
En outre, bien que cela reste exceptionnel, la responsabilité pénale du praticien est susceptible d'être recherchée s'il est démontré une erreur manifeste d'appréciation des capacités de l'interne.
L'interne a agi en l'absence de délégation
Si l'interne a agi en l'absence de délégation et en dehors de toute urgence, sa responsabilité personnelle peut être retenue ; celle de l'hôpital également, sur le fondement de la faute d'organisation pouvant résulter de l'absence de personnel qualifié, par exemple un cathétérisme cardiaque réalisé par un interne en dehors de toute urgence.