Le contexte : une IADE qui réalise des actes médicaux
Les articles L. 4011-1 et suivants du code de la santé publique (CSP) permettent aux professionnels de santé qui le souhaitent de s’engager, à leur initiative, dans une démarche de coopération ayant pour objet d’opérer entre eux des transferts d’activités ou d’actes de soins ou de réorganiser leurs modes d’intervention auprès du patient.
Après établissement de protocoles de coopération, les professionnels peuvent être amenés à réaliser des actes excédant leurs compétences habituelles. Il peut donc se poser la question de la rémunération spécifique de tels actes.
Une infirmière anesthésiste, qui avait été amenée à réaliser des actes médicaux dans le cadre d’un protocole de coopération, a assigné son employeur "pour obtenir l’indemnisation des préjudices nés de l’accomplissement de ces actes excédant ses compétences".
Le tribunal, avant de statuer, décide de soumettre la question au Conseil d’État, pour avis, dans les termes suivants : un principe général du droit oblige-t-il l’employeur public à rémunérer un fonctionnaire investi, pour assurer le fonctionnement normal du service, de tâches excédant son statut dont l’exécution exige de surcroît l’acquisition de compétences supplémentaires ?
Un agent de la fonction publique hospitalière ne peut prétendre à d’autres indemnités que celles instituées par un texte législatif ou réglementaire
Le Conseil d’État rappelle l’article 77 de la loi du 9 janvier 1986 portant diverses dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière. Il pose le principe de la rémunération des fonctionnaires régis par cette loi selon les dispositions de l’article 20 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires.
Cet article 20 prévoit que "les fonctionnaires ont droit, après service fait, à une rémunération comprenant le traitement, l’indemnité de résidence, le supplément familial de traitement ainsi que les indemnités instituées par un texte législatif ou réglementaire. Les indemnités peuvent tenir compte des fonctions et des résultats professionnels des agents ainsi que des résultats collectifs des services (...)".
Le Conseil d’État en conclut qu’un agent de la fonction publique hospitalière ne peut prétendre à d’autres indemnités que celles instituées par un texte légal ou réglementaire, à raison de l’emploi qu’il occupe. Un texte doit donc obligatoirement avoir prévu une rémunération spécifique, en plus de la rémunération statutaire.
Aucune disposition législative ou réglementaire ne prévoit une rémunération spécifique dans le cadre des coopérations entre professionnels
Après avoir cité les textes issus du code de la santé publique qui s’appliquent aux infirmiers en général, et aux IADE en particulier (article L. 4311-1, articles R. 4311-1 et suivants, article R. 4311-12), ainsi que l’article 3 du décret du 10 mai 2017 portant statut particulier des IADE de la fonction publique hospitalière, le Conseil d’État constate qu’aucun d’entre eux n’aborde la question d’une rémunération spécifique.
Il en conclut qu’aucune disposition législative ou réglementaire n’institue une indemnité rémunérant de manière spécifique l’accomplissement, par un IADE relevant de la fonction publique hospitalière, d’actes de soins qui lui ont été transférés dans le cadre d’un protocole de coopération.
À retenir
Selon le Conseil d’État, la combinaison des textes régissant l’exercice des IADE et de ceux régissant l’exercice dans le cadre de protocoles de coopération entre professionnels de santé aboutit à considérer que les actes ainsi réalisés entrent dans la mission statutaire de ces personnels, au même titre que celle des actes relevant de la profession d’infirmier et d’IADE.
Pour toutes ces raisons, il est d’avis qu’aucune rémunération complémentaire ne peut être réclamée à l’établissement.
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L’avis, publié au Journal Officiel, est transmis au tribunal administratif qui devra se prononcer sur la demande de l’IADE.