Téléradiologie : une prestation de qualité 24 h/24
La téléradiologie est la transmission électronique de l’imagerie médicale vers des sites éloignés à des fins d’interprétation et/ou diagnostiques.
La téléradiologie permet aux petites structures hospitalières de bénéficier d’un plateau technique 24 h/24 et tous les jours de l’année lorsque les effectifs de leur service d’urgences ne permettent pas une couverture aussi large et permanente de cette prestation.
Cela permet à des hôpitaux locaux de continuer à accueillir des patients au sein de leur service d’urgences et d'offrir ainsi une couverture sanitaire dans les territoires les plus démunis en spécialistes en raison des problèmes de démographie médicale. Ainsi, cela contribue à lutter contre la désertification médicale et maintenir l’activité des services d’imagerie de centres hospitaliers au plus proche des patients.
Avec le développement des systèmes d’archives et de communication d’images (PACS) et de la communication d’entreprise, la téléradiologie fait désormais partie intégrante de la vie des radiologues.
Des groupes de sociétés privées ont investi ce créneau en proposant leurs services aux structures hospitalières en France.
Cette pratique s’est développée il y a une plus d’une trentaine d’années aux Etats-Unis, permettant à des services d’urgences d’obtenir une interprétation la nuit des examens de scanner par des spécialistes radiologues localisés en Inde. Le décalage horaire a été mis à profit afin d’optimiser la prise en charge des patients consultant la nuit aux Etats-Unis tout en permettant aux radiologues des hôpitaux américains de continuer à conserver leurs plages d’interprétation d’examen la journée sans devoir faire des gardes nocturnes.
En France, comme dans beaucoup de pays, cela a eu pour principal avantage de garder des services de soins de proximité sans avoir à recourir à l’embauche de radiologues intérimaires.
La qualité du service rendu a été estimée équivalente à celle assurée par les radiologues des services hospitaliers remplacés.
Ainsi, une étude a été menée1 afin d’évaluer la qualité du service rendu par la téléradiologie. Cette étude visait, à travers une observation rétrospective, à déterminer le nombre et la gravité des écarts d’interprétation des examens tomodensitométriques, pendant une période de 21 mois consécutifs.
Les examens de tomodensitométrie ont été effectués pendant les heures de garde et ont été relus par un praticien le lendemain. Les écarts entre les rapports préliminaires et les rapports de référence ont été évalués par deux radiologues, et les différences de taux ont été évaluées en termes d’erreurs statistiques significatives.
Il n’est pas apparu de différence significative entre les interprétations faites par les radiologues du service et celles effectuées dans le cadre de la téléradiologie.
17 % seulement des relectures ont fait l’objet d’une modification d’interprétation jugée significative, amenant à modifier la stratégie thérapeutique et/ou diagnostique. Parmi ces dossiers, il n’a pas été relevé de différences significatives entre les interprétations faites par les radiologues du service et celles effectuées dans le cadre de la téléradiologie.
Cela permet de considérer que le service rendu est de qualité dans son ensemble2 et ceci peut être expliqué par le fait que les radiologues de téléradiologie sont pour la plupart, également en poste dans des hôpitaux.
Autre avantage, certaines sociétés disposant de plusieurs praticiens sur les mêmes vacations de nuit, il devient possible de solliciter un second avis et ainsi conforter l’analyse et les conclusions des examens interprétés.
Des relectures internes des images au sein de ces sociétés, avec des comités de morbi-mortalité, assurent une formation continue aux radiologues, tout comme c’est le cas dans n’importe quel hôpital général ou CHU.
La téléradiologie : les implications sur le plan médico-légal…
Les radiologues qui exercent au sein de ces sociétés de téléradiologie ont souvent le statut de praticiens libéraux même s’il existe parfois des contrats d’embauche.
Ce dernier point doit alerter les radiologues qui exercent à titre libéral afin de bien s’assurer qu’ils disposent d’une assurance couvrant leur responsabilité civile professionnelle pour téléradiologie, en plus d’une autorisation d’exercice délivrée par le conseil de l’Ordre des médecins selon leur engagement vis-à-vis de leur employeur principal (statut de praticien hospitalier temps partiel versus ceux disposant d’un contrat d’engagement d’exclusivité secteur public).
En effet, les radiologues, exerçant au sein de ces structures, ne doivent pas considérer que leur mission consiste à seulement interpréter les images qui leur sont soumises3.
Le consentement du patient doit toujours être recherché en ce qui concerne la prestation externalisée en matière d’interprétation diagnostique des images4.
Le radiologue est un médecin qui participe à la prise en charge du patient, et doit, de ce fait, apporter tout son concours au médecin urgentiste qui le sollicite afin d’établir un diagnostic fiable en y employant les moyens les mieux adaptés et les plus sécurisés dans l’intérêt du patient5.
La coopération entre l’urgentiste et le radiologue est primordiale et gage d’une prise en charge globale de qualité.
De plus, outre son rôle de conseil, en proposant une stratégie diagnostique par imagerie, le radiologue doit s’enquérir :
- du maximum d’informations cliniques sur le patient,
- des autres résultats d’investigations réalisées comme la biologie à la recherche d’une insuffisance rénale,
- des antécédents allergiques du patient qui pourraient contre-indiquer un examen avec injection de produit de contraste, par exemple.
Une bonne analyse sémiologique, tant du côté de l’urgentiste que de celle du radiologue, permettra de proposer l’examen le plus adéquat afin d’établir le bon diagnostic.
Le radiologue doit s’efforcer de renseigner de la façon la plus exhaustive et avec la plus grande précision son compte rendu en y incluant des préconisations d’avis ou d’autres examens complémentaires, afin d’orienter la stratégie de prise en charge du patient.
A retenir
La bonne coopération entre l’urgentiste et le radiologue à distance est un gage de qualité de prise en charge pour les patients.
Une revue des cas cliniques, dans le cadre de réunions régulières de morbi-mortalité, permet de contribuer à la formation continue des professionnels de santé exerçant dans le cadre des urgences, mais également d’apporter des améliorations dans le cadre de la gestion des risques entourant cette pratique.
Les avantages de la téléradiologie permettent ainsi un accès à une médecine de qualité pour tous les patients, quelle que soit la région où ils résident. Un moyen de garantir l’égalité d’accès aux soins pour tous sur le territoire national.
Notes
1- Storjohann S, Kirsch M, Rosenberg B, Rosenberg C, Lange S, Syperek A, Schweikhard FP, Hosten N. The Accuracy of On-Call CT Reporting in Teleradiology Networks in Comparison to In-House Reporting. Healthcare (Basel). 2021 Apr 1;9(4):405. doi: 10.3390/healthcare9040405. PMID: 33916229; PMCID: PMC8065948.
2- DeCorato DR, Kagetsu NJ, Ablow RC. Off-hours interpretation of radiologic images of patients admitted to the emergency department: efficacy of teleradiology. AJR Am J Roentgenol. 1995 Nov;165(5):1293-6. doi: 10.2214/ajr.165.5.7572522. PMID: 7572522.
3- Article R. 4127-32 Dès lors qu’il a accepté de répondre à une demande, le médecin s’engage à assurer personnellement au patient des soins consciencieux, dévoués et fondés sur les données acquises de la science, en faisant appel, s’il y a lieu, à l’aide de tiers compétents.
4- Article R.4127-36 Le consentement de la personne examinée ou soignée doit être recherché dans tous les cas.
5- Article R.4127-33 Le médecin doit toujours élaborer son diagnostic avec le plus grand soin, en y consacrant le temps nécessaire, en s’aidant dans toute la mesure du possible des méthodes scientifiques les mieux adaptées et, s’il y a lieu, de concours appropriés.