Toucher pelvien par un masseur-kinésithérapeute : un acte réalisable sur prescription médicale
La rééducation périnéo-sphinctérienne dans les domaines urologique, gynécologique et proctologique, y compris du post-partum à compter du 90ème jour après l’accouchement, relève des compétences du masseur-kinésithérapeute, telles qu’elles sont visées à l’article R. 4321-5 du code de la santé publique (CSP).
Sur prescription médicale, le kinésithérapeute est compétent pour pratiquer les touchers pelviens à visée diagnostique et thérapeutique dans ce cadre particulier.
Le toucher pelvien est également possible dans le cadre du traitement de coccygodynie, en ultime intention.
Par une décision du 4 août 2023, le Conseil d’Etat a clairement rappelé l’exigence d’une prescription médicale pour pratiquer un toucher pelvien.
En effet, il précise qu’aucune disposition du code de la santé publique énumérant les actes professionnels de masso-kinésithérapie n’habilite le kinésithérapeute à pratiquer un geste de toucher pelvien. Cet acte ne constitue notamment ni une manœuvre externe constitutive d’un acte de massage, ni un acte de gymnastique médicale.
Toucher pelvien : quels risques s'il est mal interprété ?
Le principal risque pour le masseur-kinésithérapeute est d’être accusé d’agression sexuelle ou de viol.
En effet, le viol, défini à l’article 222-23 du code pénal, vise "tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, menace ou surprise". Il est puni de quinze ans de réclusion criminelle.
Quant à l’agression sexuelle, les peines sont aggravées lorsqu’elle est commise par une personne abusant de l’autorité que lui confèrent ses fonctions.
Certains actes de kinésithérapie, dont les touchers pelviens, peuvent passer aux yeux de la patiente comme des actes à caractère sexuel, déconnectés de toute finalité thérapeutique, notamment s’ils n’ont pas été préalablement expliqués.
Si l'on ajoute à cela le caractère particulier de la relation patient/kinésithérapeute, à la fois basée sur la confiance et sur un rapport qui peut être perçu comme d’autorité, un toucher pelvien insuffisamment expliqué peut déboucher sur une plainte…
C'est la raison pour laquelle le Conseil national de l'Ordre des masseurs-kinésithérapeutes émet des avis, régulièrement renouvelés, sur ce sujet, depuis 2013.
Conseils pour la réalisation d'un toucher pelvien : informer la patiente
Il est primordial de respecter à la lettre l’article R. 4321-83 du CSP selon lequel le masseur-kinésithérapeute "doit à la personne qu’il examine, qu’il soigne ou qu’il conseille, une information loyale, claire et appropriée sur son état, les soins qu’il lui propose…", et l’article R. 4321-84 qui rappelle que le consentement de la personne examinée ou soignée doit être recherché dans tous les cas.
Le Conseil de l’Ordre rappelle dans son avis qu’en matière de rééducation périnéo-sphinctérienne et de traitement des troubles lombo-sacré-coccygiens, le kinésithérapeute doit impérativement :
- informer loyalement et clairement sa patiente,
- recueillir son consentement,
- et respecter tout refus qui lui serait exprimé.
Il lui appartiendra ensuite d’apporter la preuve de cette information, par tous moyens :
- limiter la réalisation de ce type de geste aux situations où il est absolument nécessaire ;
- se garder de toute familiarité à l’égard de la patiente, qui pourrait donner à l’examen un contexte pouvant prêter à confusion ;
- redoubler de précautions et d’information dans les hypothèses où la personne est vulnérable (mineur, personne âgée, etc...).