Douleurs thoraciques : l'histoire médicale...
Une jeune patiente de neuf ans, présente des douleurs thoraciques hautes apparues depuis quelques jours, sans notion de traumatisme ni facteur déclenchant évident.
Le médecin traitant prescrit des séances de massage du rachis cervico dorsal.
Le kinésithérapeute note un blocage entre deux vertèbres thoraciques, qu’il traite par une manipulation sans force.
L’enfant présente une aggravation des douleurs, qui amène à la réalisation d’un bilan radiographique qui note une fracture-tassement du plateau supérieur de la vertèbre T4, d’allure traumatique, avec un tassement peu significatif (moins du tiers de la hauteur vertébrale).
Malgré le port d’un corset, l’évolution est défavorable avec augmentation du tassement vertébral et majoration de la cyphose dorsale.
Une hospitalisation pour rechercher une cause primaire fait pratiquer un bilan biologique qui sera normal, ainsi qu’une biopsie de la vertèbre qui note des remaniements nécrotiques compatibles avec le contexte fracturaire et la présence d’une inflammation chronique non spécifique.
Une arthrodèse D2 D6 est réalisée deux mois plus tard, permettant une évolution finalement favorable.
Les bilans d’imagerie de contrôle noteront une quasi disparition du corps de T4.
Finalement, une ostéite chronique récurrente multifocale, ou OCRM, est suspectée.
Une IRM corps entier trouve, outre la lésion de la vertèbre T4, une atteinte osseuse bilatérale de l’aileron sacré, confortant le diagnostic d’OCRM.
Un diagnostic final de maladie rare
L’ostéite chronique récurrente multifocale, appelée également ostéite chronique non bactérienne, est une maladie rare (1 à 2 cas par million d’habitants) qui touche les enfants à partir de l’âge de 9 ou 10 ans.
Elle se manifeste par des poussées douloureuses osseuses récidivantes, traduisant la présence de multiples atteintes inflammatoires osseuses, ou ostéites aseptiques.
Elle peut se révéler par un traumatisme mineur, une chute ou une manipulation.
Les atteintes ostéolytiques se situent préférentiellement dans la métaphyse des os longs (surtout le tibia), mais les atteintes vertébrales ne sont pas rares.
L’IRM corps entier permet de retrouver le caractère multifocal parfois asymptomatique.
Le caractère multifocal et l’atteinte métaphysaire sont des éléments diagnostiques importants.
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La biopsie osseuse permet d’écarter une étiologie infectieuse ou tumorale.
Les anti-inflammatoires non stéroïdiens sont le traitement de première intention. En cas d’échec, les anti-TNF alpha ou les biphosphonates peuvent être proposés.
En pratique
- La lésion ostéolytique que présentait la patiente était donc en rapport avec cette ostéite chronique.
- La manipulation du kinésithérapeute ne peut pas expliquer la fracture, pathologie évolutive liée à cette ostéite.
Rappelons néanmoins la nécessité d’un bilan d’imageries et d’un diagnostic médical devant toute douleur ostéoarticulaire atypique, avant prise en charge manipulative ou fonctionnelle.