Quelle aiguille et pour quel usage ?
En clinique, quatre grands types d’analgésies sont pratiquées.
L'analgésie "para-apicale"
La plus classique dite "para-apicale" est utilisée lors de soins de dentisterie conservatrice, mais également dans le cadre d’une extraction simple, au maxillaire par exemple.
Il est ici recommandé d’utiliser une aiguille de calibre 0,30 ou 0,40*16 ou 21mm et de l’enfoncer jusqu’à la garde au niveau du fond du vestibule.
L’injection se fera de façon lente et contrôlée afin que le produit analgésiant diffuse au niveau de la zone opératoire.
L'analgésie "intra-ligamentaire"
Le deuxième type d’analgésie privilégié dans le cadre de certains soins spécifiques d’endodontie, comme les biopulpectomies, est "l’intra-ligamentaire".
Il s’agira ici d’injecter le produit au niveau du ligament alvéolo-dentaire (L.A.D.) afin de "cibler" la dent à traiter.
Compte-tenu de la constitution anatomique et physiologique du L.A.D., cet acte nécessite l’utilisation d’une aiguille de calibre 0,40*12mm.
Le produit doit être injecté de façon ferme mais contrôlée.
L'analgésie "intraseptale, ostéocentrale, ou transcorticale"
Le troisième type d’analgésie recouvre plusieurs techniques, intraseptale, ostéocentrale, ou transcorticale.
Elle consiste à déposer la solution analgésique dans le tissu osseux spongieux au voisinage de la dent à traiter.
L’infiltration se fait après avoir perforé la corticale osseuse à l’aide d’une aiguille de calibre dédiée et spécifique au matériel utilisé (pièce à main type Quicksleeper par exemple).
L'analgésie "Tronculaire"
Le quatrième type est l’analgésie à l’épine de Spix, dite "Tronculaire".
Ce type d’acte préopératoire est qualifié de locorégional, à la différence des trois précédents, considérés comme locaux.
Il s’agira ici essentiellement de soins concernant les secteurs prémolo-molaires mandibulaires dans leur ensemble, dans le cadre de rendez-vous longs mais aussi et surtout d’avulsions de dent de sagesse mandibulaire.
Le principe de l’analgésie tronculaire est d’injecter le produit à proximité du pédicule vasculo-nerveux issu de la branche V3 du nerf trijumeau (nerf dentaire inférieur ou N.D.I.) qui innerve, entre autres, les dents mandibulaires. Par définition, la zone concernée par notre acte clinique n’est pas visible mais repérable anatomiquement.
L’acte opératoire requiert ici une aiguille de calibre 0,50*35mm car les tissus explorés, mous et osseux, nécessitent un contrôle d’autant plus maitrisé que nous travaillons "à l’aveugle".
Comment éviter que l'aiguille casse ?
La première exigence du praticien, afin de prévenir tout risque potentiel, est d’utiliser une aiguille conforme et adaptée à l’acte analgésique requis, donc à la dent ou à la zone bucco-dentaire à traiter.
Ainsi, dans les rares cas de fracture d’aiguille, illustré par le dossier que nous évoquons, c’est l’obligation de moyens qui n’a pas été respectée : en l’occurrence, l’utilisation d’une aiguille dont le calibre n’était pas adapté à l’acte thérapeutique préconisé, une "tronculaire" réalisée avec une aiguille pour para-apicale en l’espèce, dans le cadre de l’avulsion d’une dent de sagesse inférieure droite.
Les conclusions du cas retenu ici ont débouché sur une imputabilité totale envers le praticien pour défaut d’information, de moyens et de suivi.
Rappelons cependant que ce genre de litiges reste rare.
À noter qu’un défaut de fabrication n’est pas exclu malgré l’attention que porte le praticien au choix de l’aiguille.
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Que faire quand l'aiguille casse ?
En cas de survenue d’un accident de ce type, le praticien à l’origine du fait générateur doit adresser, voire accompagner son patient à l’hôpital, afin que le fragment d’aiguille soit retiré. Acte complexe in fine puisque, le fragment d’aiguille fracturé ne peut être retiré dans de nombreux cas.
Et même quand le retrait du morceau d’aiguille brisé a été effectué, les complications suivantes ont été décrites :
- Douleurs au niveau de l’oreille du côté de la zone opérée.
- Paresthésie du nerf V3 (engourdissement de la langue, des lèvres, et du côté du menton concerné par la zone opérée).
- Trismus postopératoire.
Pour autant, il n’y a pas de consensus sur la prise en charge immédiate ou à distance de ce type d’incident :
- Retirer l’aiguille fracturée au plus tôt préviendrait les complications dues à sa migration potentielle dans les structures vitales de la tête et du cou.
- L’autre attitude thérapeutique, à savoir la temporisation, considère que des tissus cicatriciels se forment autour du corps étranger, la fibrose ainsi constituée limitant le risque de complications. Cependant, ce cas de figure impose au patient d’être suivi régulièrement afin de déceler toute complication.