Le secret médical, obligation pour le soignant et droit pour le patient
Le secret médical est une règle déontologique depuis le serment d’Hippocrate. Consacrée à l’article R.4127-4 du Code de la santé publique, cette obligation pour le médecin est devenue un droit pour le patient depuis la loi Kouchner du 4 mars 2002, codifié à l’article L.1110-4 du Code de la santé publique.
Le secret médical couvre l’ensemble des informations concernant un patient qui sont portées à la connaissance du professionnel de santé (identité, diagnostic, traitement, confidences…). Il s’étend à ce qui a été confié par le patient mais également à tout ce qui a pu être vu, entendu, compris voire interprété lors de l’exercice médical.
Le respect du secret médical est garant de la qualité de la relation entre le médecin et son patient, lequel doit avoir la certitude que les informations confiées à son médecin et dont il est le maître ne seront pas divulguées.
Cas général d’un accompagnant
La HAS a délivré en 2012 certaines recommandations de bonne pratique sur la délivrance de l’information à la personne sur son état de santé1. Elle préconise ainsi au professionnel de santé de s’assurer que son patient souhaite la présence de l’accompagnant lorsque l’information est délivrée et de lui proposer que l’entretien soit en partie singulier.
Il est important de distinguer les différentes étapes de la consultation médicale :
- L ’interrogatoire et l’examen clinique sont plutôt des temps réservés au médecin et à son patient.
- Le diagnostic et l’explication du traitement peuvent être réalisés en présence de l’accompagnant, si le patient le demande.
- Les conseils prodigués en fin de consultation en présence d’un proche permettent souvent une meilleure compréhension de la prise en charge thérapeutique et parfois une meilleure observance de la prescription.
L'accompagnant, personne de confiance
La possibilité de désigner une personne de confiance est prévue par la loi.
L’article L.1111-6 du code de la santé publique dispose :
"Toute personne majeure peut désigner une personne de confiance qui peut être un parent, un proche ou le médecin traitant et qui sera consultée au cas où elle-même serait hors d'état d'exprimer sa volonté et de recevoir l'information nécessaire à cette fin. Elle rend compte de la volonté de la personne. Son témoignage prévaut sur tout autre témoignage. Cette désignation est faite par écrit et cosignée par la personne désignée. Elle est révisable et révocable à tout moment. Si le patient le souhaite, la personne de confiance l'accompagne dans ses démarches et assiste aux entretiens médicaux afin de l'aider dans ses décisions".
- La personne de confiance a donc le droit d’accompagner le patient et d’assister à ses entretiens médicaux, lorsque ce dernier le souhaite.
- La HAS recommande de proposer dans un premier temps qu’une partie de l’entretien avec le malade se fasse en tête-à-tête, sauf si la personne s’y oppose.
L'accompagnant interprète
Lorsqu’un patient ne maîtrise pas la langue française, il est fréquent qu’il soit accompagné d’une personne pouvant faire office de traducteur. Il peut s’agir d’un proche mais également d’un professionnel.
Cet accompagnant permet alors au médecin d’assurer le devoir d’information lui incombant (article L.1111-2 du CSP). La HAS recommande d’ailleurs aux professions de santé de toujours faire appel, si possible, à un interprète pour permettre la bonne compréhension des informations échangées avec le patient ne maîtrisant pas la langue française.
La présence du traducteur est principalement requise et utile pour la phase de l’interrogatoire (afin de bien comprendre le motif de la consultation, les symptômes du malade, les antécédents, etc.) et lors de l’annonce du diagnostic et de l’explication du traitement.
S’agissant de l’examen clinique, le professionnel de santé doit le réaliser hors la présence du traducteur.
L'accompagnement d’une personne en situation de handicap
La présence d’un tiers aidant lors des consultations des personnes en situation de handicap est considérée comme souhaitable par 92 % des médecins et 91 % des patients, selon une enquête conduite par le Conseil National de l'Ordre des Médecins à l'occasion des 20 ans de la loi Kouchner2.
Lorsque la personne est en situation de handicap sensoriel ou moteur en dehors de toute altération cognitive, il est conseillé de faire appel à un assistant de communication.
L'accompagnement du majeur protégé
Le Conseil National de l’Ordre des Médecins rappelle le principe de l’autonomie de la personne quelle que soit sa mesure de protection3.
L’article 459 du Code civil prévoit que la personne protégée, sauf exception, peut prendre elle-même les décisions touchant à sa personne.
Néanmoins, il arrive que la personne protégée ne soit pas apte à prendre une décision éclairée. Dans ce cas, le juge peut décider que la personne en charge de la mesure de protection devra l’assister lors de ses rendez-vous médicaux, et si nécessaire la représenter.
Le médecin doit donc être vigilant lorsqu’il se trouve face à un patient ayant le statut de majeur protégé.
Il est conseillé de demander une copie du jugement afin de pouvoir vérifier l’ensemble des éléments composant la décision du juge en matière de santé et s’assurer que le patient sous mesure de protection est habilité à prendre des décisions concernant sa santé.
L'accompagnement d'une personne mineure
Lors d’une consultation médicale, le mineur est en principe accompagné de ses parents ou de toute personne titulaire de l’autorité parentale.
Le médecin va alors délivrer les informations nécessaires à la prise en charge médicale, aussi bien aux titulaires de l’autorité parentale, qu’au mineur tout en adaptant la communication en fonction de son degré de maturité.
Le médecin ne peut donc pas refuser la présence des personnes titulaires de l’autorité parentale lors de la consultation médicale.
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Toutefois, lorsque le patient est adolescent, il peut être utile d’effectuer l’interrogatoire en tête-à-tête, en dehors de la présence parentale. Ce temps d’échange permet en effet au jeune patient de se confier librement et de livrer des informations importantes à sa prise en charge médicale qu’il ne divulguerait pas aussi aisément face à ses parents.
L’examen clinique doit également être pratiqué en toute confidentialité.
Cas particulier d’une opposition du mineur
Il existe une exception lorsque le mineur s’oppose à la consultation de ses parents sur des décisions médicales le concernant afin de garder le secret sur son état de santé.
Une personne majeure doit néanmoins accompagner le mineur lorsqu’il s’agit d’une intervention.
Cette possibilité est inscrite dans la législation à l’article L.1111-5 du Code de la santé publique.
Le mineur peut ainsi bénéficier confidentiellement d’une consultation médicale sans l’accord de ses parents dès lors que le secret ne compromet pas gravement sa santé ou sa sécurité4.
En outre, il peut également s’opposer à la divulgation de son dossier médical à ses parents et le praticien doit alors consigner ce refus par écrit.
Le tiers, inconnu du patient
Le médecin a une obligation d’information vis-à-vis du patient et il doit systématiquement obtenir son consentement à la présence d’un tiers lors de la consultation médicale.
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Le patient est ainsi toujours libre d’accepter ou de refuser qu’une autre personne que le praticien consulté assiste à la consultation et/ou à l’examen clinique (ex : interne, élève infirmière ou élève sage-femme, etc.).
La chambre disciplinaire nationale de l’Ordre des Médecins et le Conseil d’Etat ont ainsi estimé qu’un médecin imposant un tiers lors de l’examen intime, sans que la patiente puisse exprimer son refus avant le début de l’examen, manque à son devoir d’information et à ses obligations déontologiques5.
Que retenir ?
- Quel que soit le contexte, l’accompagnant à la consultation médicale doit être accueilli favorablement par le professionnel de santé, sauf si cela pourrait nuire aux soins prodigués ou à la qualité des échanges avec le patient ou encore pour respecter des normes sanitaires (ex : Covid-19).
- Le secret médical et la règle de la confidentialité ne peuvent pas être un prétexte avancé par le professionnel pour refuser l’accompagnant. Seul le patient peut décider avec qui il souhaite ou non partager les informations le concernant.
- Il peut être bénéfique de discuter en amont seul avec le patient lorsque cela est possible afin de déterminer la place qu’il souhaite donner à ses proches dans sa prise en charge médicale.
- En cas d’annonce de diagnostic ou d’échange sur un sujet sensible, il est recommandé de s’assurer que le patient souhaite toujours la présence de son accompagnant lors de cette étape. Le professionnel de santé pourra, par exemple, décider conjointement avec le patient que l’accompagnant sera partiellement présent lors de l’explication du traitement et de la prise en charge thérapeutique mais absent lors de l’interrogatoire et des examens cliniques.
- Les décisions prises doivent toujours l’être dans l’intérêt du patient en recueillant systématiquement son consentement sur la présence d’un proche ou d’un tiers lors de la consultation.