Que disent les textes1 ?
Selon le droit français, le mineur non émancipé est réputé incapable de donner valablement son consentement.
Le chirurgien-dentiste recherchera obligatoirement, hors les situations médicales d’urgence, le consentement du ou des titulaires de l'autorité parentale, qu’ils soient ensemble ou séparés, pour toute intervention médicale ou chirurgicale sur le mineur.
Aucune exception n’est faite pour un autre membre de la famille du mineur.
A défaut d'accord dans un délai raisonnable, par exemple en cas de désintérêt d'un des parents, le chirurgien-dentiste pourra agir avec l'accord d'un seul d'entre eux.
Le consentement des parents peut être retiré à tout moment.
La loi du 4 mars 2002, dite Loi Kouchner, a consacré le droit à l’information et au consentement de la personne mineure elle-même. Cela implique que le consentement du mineur soit recherché, en fonction de son degré de maturité.
Quelles règles en fonction des actes réalisés ?
- Pour les soins odontologiques courants dits usuels, le recueil du consentement d’un seul des deux titulaires de l’autorité parentale est requis. Ce titulaire de l’autorité parentale, accompagnant le patient mineur et donnant son accord pour sa prise en charge thérapeutique, est réputé agir avec l’accord de l’autre titulaire de l’autorité parentale.
Il est conseillé de mentionner dans le dossier médical le nom du titulaire de l’autorité parentale ayant reçu l’information et qui a consenti aux soins.
- En cas d'actes non usuels tels que les extractions de dents de sagesse ou chirurgie orthognatique par exemple, le consentement conjoint des deux titulaires de l'autorité parentale est nécessaire.
En cas de procédure judiciaire, le praticien pourrait voir sa responsabilité engagée sur le fondement d’un défaut d’information. Le praticien peut également s’exposer à une sanction disciplinaire allant de l’avertissement à une suspension temporaire d’exercice.
Zoom sur les situations particulières fréquemment rencontrées en cabinet dentaire
En cas de séparation des parents et/ou en cas de conflit
En cabinet dentaire, dans l’immense majorité des cas, seuls des actes usuels sont réalisés ; ils ne requièrent que l’accord d’un des parents, réputé agir avec l’accord de l’autre. Le plus souvent, l’enfant est accompagné de l’un deux. La recherche du consentement de l’autre parent n’est donc requise qu’en cas d’actes non usuels.
En cas de situation d’urgence
L’article R4127-236 du Code de déontologie des chirurgiens-dentistes expose :
"(…) Lorsqu'il est impossible de recueillir en temps utile le consentement du représentant légal d'un mineur ou d'un majeur légalement protégé, le chirurgien-dentiste doit néanmoins, en cas d'urgence donner les soins qu'il estime nécessaire."
Les urgences dentaires sont majoritairement infectieuses ou traumatiques et ne mettent quasiment jamais en jeu le pronostic vital du patient. Elles nécessitent néanmoins une prise en charge rapide en raison :
- de la douleur,
- du risque de diffusion de l’infection,
- des conséquences esthétiques,
- de l’altération fonctionnelle possible,
- de la perte de chance à laquelle le mineur serait exposé en l’absence de traitement.
On peut citer par exemple une impaction, une expulsion dentaire, une fracture dentaire avec exposition pulpaire, une plaie labiale, une pulpite ou une cellulite.
Dans la majorité des cas, le patient mineur qui consulte en urgence est accompagné d’un ou des titulaires de l’autorité parentale.
Le recueil du consentement ne sera donc pas problématique, la démarche de consultation en urgence et donc la volonté de réaliser les soins d’urgence étant acquise.
Que faire en cas de refus de soin exprimé par un ou des titulaires de l'autorité parentale ?
L’article R.4127-236 du Code de déontologie des chirurgiens-dentistes énonce :
"Le consentement de la personne examinée ou soignée est recherché dans tous les cas, dans les conditions définies aux articles L.1111-2 et suivants. Lorsque le patient, en l'état d'exprimer sa volonté, refuse les investigations ou le traitement proposés, le chirurgien-dentiste doit respecter ce refus après l'avoir informé de ses conséquences."
En l'absence d'urgence, lorsque les parents ou le représentant légal refusent de signer l'autorisation de soins ou bien si leur consentement ne peut être recueilli, il ne peut être procédé à aucun acte de soin.
À charge pour le chirurgien-dentiste de conserver une trace écrite dans le dossier médical du patient mineur sur la nécessité des soins, sur l’éventuelle impossibilité d'obtenir l'accord des titulaires de l'autorité parentale et sur les conséquences éventuelles sur la santé du patient mineur en cas de refus de soins.
Que faire si le patient mineur exprime son refus de se faire soigner ?
En principe, la décision des titulaires de l’autorité parentale prévaut sur celle du mineur.
En pratique, lorsqu’il refuse par crainte de la douleur ou par une peur disproportionnée et incontrôlable par exemple, le chirurgien-dentiste, en lien avec la famille, devra tenter de convaincre le mineur de recourir à des techniques de prise en charge de l’enfant difficile (hypnose, MEOPA, thérapie cognitive, sophrologie, etc.).
En cas de refus de l'enfant, le rapport bénéfice/risque de l'abstention thérapeutique doit être envisagé avec les parents consentants. Il sera donc parfois nécessaire de passer outre la volonté de l'enfant, dans son seul intérêt.
La seule exception concerne le mineur dont les liens de famille sont rompus et qui bénéficie d’une couverture sociale à titre personnel : il est seul à pouvoir consentir aux soins.
Que faire quand le mineur se présente seul au cabinet ?
Il peut exister deux situations :
- Il s’agit d’une première consultation (hors situation d’urgence). Aucun contrat de soin n’a été établi avec les titulaires de l’autorité parentale. Leur information et leur recueil du consentement n’ayant pu être réalisé, le seul consentement du mineur étant insuffisant, aucun soin ne pourra être entrepris.
- Il s’agit d’une prise en charge en cours (cas fréquent en orthodontie), les soins pourront être délivrés. L’absence d’accompagnant pourra être notée sur le dossier médical.
Par ailleurs, tout élément (absence d’observance du traitement, hygiène bucco-dentaire insuffisante, incident lors des soins, découverte d’un élément susceptible de modifier le traitement...) nécessitant une information complémentaire et/ou l’obtention d’un nouveau consentement éclairé des titulaires de l’autorité parentale devra leur être communiqué (par courrier, par mail, téléphoniquement) afin de fixer un rendez-vous en présentiel.
A retenir
Le droit ne peut pas encadrer précisément toutes les situations et le législateur laisse donc à l’appréciation du chirurgien-dentiste :
- ce qui relève ou non de l’urgence,
- la décision d’agir ou pas.
Le dossier médical reste la pierre angulaire en cas de contestation. Les éléments suivants devront y être mentionnés :
- l’identité du titulaire de l’autorité parentale,
- la date et le contenu de l’information délivrée,
- l’anamnèse médicale,
- l’examen médical comprenant les radiographies et photographies si nécessaire,
- les alternatives thérapeutiques,
- les risques auxquels est exposé l’enfant en cas de refus,
- et le cas échéant, toutes les tentatives pour joindre les détenteurs de l’autorité parentale en leur absence.